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L’avocat jouait sur du gazon

Plusieurs justiciables ne connaissent pas leurs droits et surtout pas, leurs devoirs.

Certains d'entre eux déposent plainte pour un délit donné, mais s'effacent le jour du procès. Et là, c'est l'inculpé adverse et son avocat qui jouent sur du... gazon... Fateh R. a déposé plainte pour menaces, fait prévu et puni par l'article 284 du Code pénal. À la barre, seul l'inculpé N. Farid. flanqué de Maître Mohamed Bouaïchaoui, son conseil, explique qu'il avait été chargé de surveiller les alentours de la salle des fêtes du quartier et donc d'empêcher les intrus de rôder sur le périmètre réservé aux seules femmes et jeunes filles venues s'éclater et ce n'est pas rien en cette période triste du début du mois chaud, à la limite de l'exaspération. Or, vous devinez aisément ce que peut faire un jeune en «mission», ce qu'il peut faire surtout s'il surprend un dragueur entêté. Farid dit au président, que la pseudo-victime n'avait pas cessé de le taquiner en sifflant la gent féminine qui affluait dans la salle où elle était censée s'éclater et elle se rendait dans la salle des fêtes, avec un moral du tonnerre. «D'abord, monsieur le président, où est la victime? Pourquoi ne s'est-elle pas présentée devant vous? Ensuite, quelle est...» Le juge l'interrompt en lui apprenant qu'il n'y avait dans cette salle d'audience qu'une seule et unique personne censée poser des questions: «C'est moi, le seul magistrat qui détient la police de l'audience, donc le plus apte à poser des questions!». Après cette sèche et nécessaire mise au point, le juge accorda la parole à l'inculpé pour se défendre. Aussitôt, le «gamin» est entré dans un monologue faisant de la morale autour de la tenue des visiteurs accompagnateurs des femmes invitées, sur les dragueurs, les empêcheurs de faiseurs de fêtes, les voyous et autres dévoyés et garçons sans foi ni loi; prêts à faire d'une fête, un regrettable drame, souvent évitable, pour peu que la raison l'emporte sur la folie passagère. Le juge l'aide un tout petit peu en lui posant deux questions relatives aux menaces, Ordonnance n° 75 -47 du 17 juin 1975 de l'article 284 du Code pénal qui dispose que: «Quiconque menace, par écrit anonyme ou signe, image, symbole ou emblème, d'assassinat, d'emprisonnement ou tout autre attentat comme les personnes, serait punissable de la peine de mort ou de la réclusion perpétuelle, est, dans le cas où la menace est faite avec ordre de déposer une somme d'argent dans un lieu indiqué, ou de remplir toute autre condition, puni d'un emprisonnement de deux (2) ans à dix (10) ans et d'une amende de cinq cents (500) à cinq mille (5 000) dinars. Le coupable peut, en outre, être frappé pour un an au moins et cinq ans au plus de l'interdiction d'un ou plusieurs des droits mentionnés à l'article 14 de l'interdiction de séjour.»
Les deux réponses sont super négatives. Le tout jeune procureur, fraîchement parachuté au tribunal ne veut rien savoir. Il a sous les yeux le procès-verbal d'audition de toutes les parties, la plainte: il requiert mécaniquement une peine de prison ferme de six mois et une amende de 500 dinars. Maître Mohamed Bouaïchaoui, l'avocat blond, pour l'inculpé, revient sur l'absence totale de menaces. «La pseudo-victime a voulu se venger de mon client car il ne l'a pas laissée jouer sur du... gazon sur le dos des familles honorables! Il veille sur les honnêtes gens afin que ces derniers ne soient pas déplumés, car c'est devenu une sale habitude instaurée par des automobilistes lâches et couards.
Ils vous répondraient au cas où vous attireriez leur attention sur le fait qu'il ne faut jamais leur débourser le moindre dinar, qu'ils préfèrent casquer au lieu de laisser un pare-brise, ou des phares brisés! C'est vraiment fou, mais c'est comme cela. Quelle lâcheté très mal placée, mes amis! On préfère payer des maîtres-chanteurs et ne pas leur résister», a dit le conseil qui a demandé expressément la relaxe au bénéfice du doute si le tribunal ne pouvait aller à la relaxe pure et simple. Miloud, le vieux greffier, prend acte de tout...
Après avoir noté le traditionnel dernier mot que la loi permet, le juge prend sa décision sur le siège et suit, les yeux fermés, les demandes de l'avocat. L'inculpé, lui, est retourné chez lui, heureux, accompagné de sa maman qui a suivi depuis le banc réservé aux familles, tout le procès, le coeur gros, les tripes nouées, le front perlant et les mâchoires serrées. Maître Mohamed Bouaïchaoui, l'avocat qui a fini de bomber le torse, heureux que le juge l'ait suivi, laisse échapper un sourire franc qui en dit long sur sa satisfaction que justice fut rendue.

De Quoi j'me Mêle

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