{{ temperature }}° C / {{ description }}

Cité introuvable.

24ème Salon international du livre d'Alger : Kamel Bouchama, à L’expression

«Disons les choses simplement»

Quelques questions posées à Kamel Bouchama qui n’est plus à présenter, de par son parcours politique et sa production littéraire qui monte en nombre d’ouvrages et en qualité, c’est-à-dire d’une teneur qui se veut constamment révélatrice d’un écrivain en quête de vérité, cette substance – nous dit-il souvent – «qui nous a lamentablement fait défaut dans nos actions».
En ce 24ème Sila, Kamel Bouchama nous gratifie de quatre (4) ouvrages, comme l’année dernière... excusez du peu !

L’Expression : Ce n’est pas la première fois que vous écrivez sur les responsables politiques de notre pays. Est-ce de la nostalgie ou tout simplement parce que vous avez cette sensation de vouloir les faire connaître aux jeunes ? De les innocenter et les réhabiliter... n’est-ce pas ?

Kamel Bouchama : Question pertinente évidemment qui, à elle seule, nécessite des pages et des pages en guise de réponse. Mais, je ne peux vous imposer un long discours, même si l’envie ne me manque pas pour tout dire, concernant ces personnalités auxquelles vous faites allusion. Ce travail, je le laisse aux historiens qui, avec un tant soit peu de volonté, d’honnêteté intellectuelle et, peut-être, avec une certaine dose de courage, pourront restituer aux jeunes le parcours réel de ces responsables et leur participation à l’édification du pays, qu’ils voulaient sous un État de droit.
En cette année-là, j’ai osé faire une virée dans le passé pour remémorer Si Slimane – Kaïd Ahmed – un personnage dont la perfection résidait dans ce qu’il était… Assurément, il a été un auguste personnage aux qualités humaines, qui possédait le sens aigu de l’engagement, du dévouement et du sacrifice. Le livre, je l’avais intitulé : «Kaïd Ahmed, homme d’État», cet Homme disposait d’une vaste culture et de vertus cardinales qui en faisaient celui auquel nul ne pouvait ressembler…
Présentement, je ne vais pas trop épiloguer sur cette production, si ce n’est pour dire que j’ai repris l’ouvrage en cette année 2019, en une 2ème édition, revue, corrigée et augmentée. Ce travail obéit à une logique. J’ai pu rassembler de nouveaux documents, venant de hautes personnalités nationales qui témoignent de la grandeur – oui de la grandeur – de celui qui n’était connu, au sein de l’ancienne génération, que par des descriptions qu’on a si insidieusement élaborées ou déformées. Ce livre, bien remodelé, et je laisse aux lecteurs le soin de découvrir le vrai Kaïd Ahmed, ne vient pas pour l’innocenter, comme vous le dites, ou tout simplement pour le réhabiliter. D’ailleurs, je me demande pourquoi parler «d’innocence» et de «réhabilitation», ces substantifs qui nous viennent des tribunaux pour balayer les relents d’opprobre, de diffamation et de vindicte ? Kaïd Ahmed n’était pas dans ce chapitre car les campagnes fallacieuses, ne lui venaient pas de militants, mais de spécialistes en désinformation. Ce livre auquel s’ajoute un deuxième, intitulé : Kaïd Ahmed, réflexions d’un visionnaire, dont il est le propre auteur, et que j’ai présenté et annoté pour le mettre sur le marché de la littérature, la belle littérature qui instruit, qui forme et qui mobilise autour de concepts sérieux et stimulants, sont une somme de cours magistraux qui rappellent que dans cette Algérie qui, présentement, se meut vers le bon sens, je l’espère fortement, il y avait ce Géant de la politique qui en appelait, déjà en 1972, à un retour aux sources de la légitimité.
Oui, Kaïd Ahmed, dans une décision prophétique – nous n’étions que dans la dixième année de l’indépendance – il parlait, déjà, de deuxième République que le peuple de la révolution du 22 février (le Hirak) reprend à son compte cinquante sept ans après, écrit le professeur Chems Eddine Chitour, en préfaçant ce 2ème ouvrage. Mais l’esprit retors de ces politiciens prêts à toutes les intrigues, toutes les turpitudes, s’est fait un malin plaisir de le vouer aux gémonies, en versant dans l’anathème, quand ce n’était purement pas dans la calomnie ou l’insulte.
Je réponds à ces spécialistes de déclarations haineuses et..., sans fondement, bien évidemment, par cette autre déclaration concise et responsable de Kaïd Ahmed, dans un de ses écrits : «N’est-ce pas le temps d’aller vers une décision politique, historique, comme celle qu’ont prise des Hommes pour tracer notre destin un certain 1er Novembre 1954 ? N’est-ce pas l’instauration d’une nouvelle République – ayons le courage d’y penser et de l’exprimer –, une «IIème République» pour être plus clair, qui bannira la peur de penser, l’étouffement de l’initiative créatrice et la stérilisation intellectuelle dont est affligé le pays? » En effet, nos parents disaient : «Lima Arfak Khesrak... ». C’est pour cela que les deux ouvrages réservés à Kaïd Ahmed, que l’Enag a su présenter en deux beaux volumes, sur le plan de l’esthétique, à la hauteur de l’Homme d’État, doivent être lus attentivement et souvent repris comme repères. Parce qu’ils sont une mine d’informations et de connaissances sur divers sujets
d’ordre politique, économique, social et culturel, dont il a eu à traiter, de son vivant, dans le but d’éclairer et présenter aux militants du FLN et à l’opinion publique, des réflexions et contributions entrant dans le cadre du projet d’édification du pays. Je m’arrête là, pour laisser les lecteurs apprécier d’eux-mêmes Kaïd Ahmed, homme d’État et Kaïd Ahmed, réflexions d’un visionnaire, deux ouvrages que je considère, à juste titre, comme une véritable plongée dans le passé. ils auront certainement, comme moi, la même charge d’émotion envers cet ancien dirigeant qui a combattu à visage découvert des groupes de pression, existants effectivement chez nous, qui a été amené à dénoncer publiquement les risques de dérive qui pesaient sur le pays ainsi que les aberrations économiques, promues au rang de dogmes.

Votre autre ouvrage sur l’Émir Abdelkader nous laisse entendre que vous faites le maximum, avec d’autres bien sûr, Waciny Laredj, par exemple, pour mettre en valeur cet héroïque combattant de la liberté... Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
Effectivement, l’Émir a été l’héroïque combattant de la liberté, le fondateur de l’État algérien moderne, de même que le précurseur de la révolution de Novembre et du droit international humanitaire. Comment donc, ne pas le mettre en valeur auprès des jeunes, lui qui a été quasiment relégué au second plan de l’Histoire de notre pays, par son propre pays... Pourquoi ? On n’en sait rien ou, peut-être si, beaucoup de choses ! Car, les responsables d’alors, jusqu’à aujourd’hui, n’ont pas cru nécessaire d’aller sur ce terrain. Pourquoi ?
L’Émir n’est-il pas parmi ces hommes qui possèdent le don d’éveiller, chez leurs semblables, de nobles sentiments de vénération et d’enthousiasme ? L’Émir Abdelkader, le penseur et le guerrier, qui a suscité l’admiration de tous ceux qui l’ont approché parmi les «Grands» du monde des sciences, de la culture, de la pensée et des organisations internationales, fut l’un de ces hommes-là ! De Desmichels à Bugeaud, tous ceux qui le combattirent ou le rencontrèrent se plurent à reconnaître son génie et la noblesse de son âme. Ainsi, et nonobstant les tentatives d’occultation de son légendaire parcours, il survivra, ad vitam aeternam, dans la pensée des Algériens, dans le respect des peuples du Moyen-Orient et de tous les pays du monde, particulièrement ceux qui aiment l’élévation et le progrès par la Science, la Culture et la Paix, de même que ceux qui combattent pour les causes justes que sont la Liberté, la Justice, l’Égalité et le Respect de l’autre.
C’est pourquoi le chef de guerre, le stratège militaire, l’homme politique, l’homme de dialogue, le chevalier de la foi et de la liberté, le guide spirituel, enfin l’homme des valeurs nobles, que fut notre Émir Abdelkader, attend que l’on salue son passage dans l’Histoire et qu’on en reconnaisse toute l’importance. Toutes ces impressions sont exprimées tout au long de mon ouvrage : L’Émir Abdelkader et les siens, l’ultime étape au Levant où je le mets en exergue dans sa deuxième vie au Moyen-Orient, une étape importante, mais méconnue en Algérie, son pays.

Une dernière question pour votre quatrième ouvrage de cette année, au Sila. Affaires étranges, c’est quoi ce titre ? Ne s’agit-il pas d’un constat amer après votre passage aux Affaires étrangères, n’est-ce pas ?
En effet, c’est le regard de celui «qui vient de l’extérieur», comme moi, l’intrus hélas, dans la sémantique des indétrônables, ou des indécrottables paresseux du secteur – c’est selon –, cet intrus donc qui observe avec discernement et qui n’a évidemment aucun intérêt à enfoncer ceux avec qui il travaille – parce qu’il demeure loin de leurs entourloupes. Cet ouvrage servira, sans aucun doute, s’il reste de la volonté et de la détermination chez les responsables qui les dirigent, à faire des choix autrement plus judicieux et plus intéressants. Des choix qui fouetteront notre secteur qui a besoin de se refaire une santé pour évoluer et permettre à notre diplomatie de reprendre ses droits et sa place d’antan.
Il est évident que, même si cet ouvrage ne prend pas en charge les aspects de notre politique étrangère, je suis suffisamment conscient pour reconnaître, honnêtement et sincèrement, que sur le plan international, notre pays a fait, par le biais de ses véritables diplomates, des managers chevronnés et passionnés de nature, un travail colossal, depuis l’indépendance. Ceux-là ont imprimé à notre diplomatie, la vraie, un dynamisme qui a fini par faire de l’Algérie un partenaire écouté et respecté à travers le monde.
Le mérite revient, incontestablement, à tous ceux-là et à d’autres, parmi les jeunes, qui fournissent, jusqu’à l’heure, les efforts de militants conscients de leur devoir. Ainsi, notre politique étrangère, conduite avec sagesse, lucidité et réalisme par de bons militants diplomates, s’oriente vers cette culture de la paix dans laquelle elle enracine ses convictions. J’insiste sur ces réalités – auxquelles je crois profondément – pour ne pas être taxé de nihiliste et de polémiste, ou carrément de perturbateur qui s’attaque, sans vergogne, à une institution de souveraineté et écorche, par-delà, tous ces diplomates de valeur, que dis-je ces nationalistes, qui ont fait que notre politique extérieure reflète fidèlement et consciemment les valeurs pour lesquelles notre peuple s’est soulevé et s’est sacrifié pour recouvrer sa souveraineté nationale.
Alors, cet ouvrage ne vient pas pour enfoncer le clou, mais pour rappeler les déboires de ces cadres qui vivent l’illusion d’appartenir à un système fiable, mais qui, en réalité, n’est qu’un conglomérat de pratiques désuètes, même plus, indélicates, entretenues par des commis consentants qui, faute de courage et de personnalité, jouent les premiers rôles dans «une comédie triviale pour gens sérieux»...
C’est pourquoi il est temps, aujourd’hui, de dire clairement ce que nous voulons faire de notre système dans un pays qui recèle des potentialités inimaginables…
Ne faudrait-il pas que nous soyons plus aguerris, plus honnêtes, pour dire les choses simplement, directement, et aller au-devant de notre destin, avec des méthodes autrement plus saines ? En tout cas, c’est le leitmotiv de toute société qui veut gagner le pari de la modernité et du progrès. Sans cela, nous resterons éternellement dans notre bricolage et nous souffrirons encore de ces malotrus qui sèment, à tout vent, les doutes et les équivoques.

Amar BELBEY

De Quoi j'me Mêle

Placeholder

Découvrez toutes les anciennes éditions de votre journal préféré

Les + Populaires

(*) Période 7 derniers jours