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24ème Salon international du livre d'Alger : Seydou Nourou Ndiaye éditeur sénégalais

«Je suis un militant de la langue amazighe»

Le Sénégal est le pays invité d’honneur au 24ème Sila. Parmi les membres de la délégation sénégalaise, il y a le directeur chevronné des Éditions Papyrus Afrique qui est une maison d’édition francophone, publiant principalement en langues africaines. Elle se fixe comme mission le développement d’une littérature moderne en langues nationales. Depuis sa création en 1996, elle œuvre
dans cette mission et a à son actif plus de 130 ouvrages publiés dans les langues de l’Ouest africain. Disposant d’un large lectorat dans la sous-région et dans la diaspora en Europe et aux U.S.A, les Éditions Papyrus Afrique publient également un mensuel d’informations générales en wolof et pulaar Lasli/Njëlbéen. Fondées et dirigées par Seydou Nourou Ndiaye, elles ont été lauréates du prix Alioune Diop pour la promotion de l’édition en Afrique en 2002. Elles ont été aussi les premières à obtenir le Prix national pour la promotion de l’édition au Sénégal en 2005. Présentes au Sila, leur directeur nous parle ici avec enthousiasme de son engagement..

L’Expression : Pourriez-vous tout d’abord nous présenter votre maison d’édition ?
Seydou Nourou Ndiaye : Papyrus Afrique est une maison d’édition qui a été fondée le 25 mars 1996. C’est une maison d’édition qui a décidé à sa naissance de ne pas être de langue française ni de langue anglaise, mais de langue africaine. C’était une folie parce que ce n’était pas rentable. C’était même suicidaire, mais pour nous il fallait commencer et je disais toujours aux gens : est-ce que le cercle de La pléiade, avec les Ronsard, du Bellay…
Quand ils se battaient pour la défense et l’illustration de la langue française, est-ce qu’on disait d’eux qu’ils perdaient leur temps? Car ce n’était pas évident. Il fallait quand même ce processus-là, pour que la langue française soit ce qu’elle est devenue. Je pense que ce n’est pas juste qu’il y ait des langues africaines parlées par des millions de locuteurs, comme la langue amazighe, comme le pulard, le fulfuldé, comme le mandingue, des langues de grandes civilisations, mais par la volonté de la colonisation, elles ont été mises à l’écart, entre parenthèses.
Les grands empires parlaient ces langues là, mais aujourd’hui on ne les parle plus parce qu’une langue étrangère est venue dominer et de façon artificielle. Ce qui nous fait mal, c’est la domination de cette langue qui devient langue officielle, langue d’instruction de nos enfants, langue d’étude…Alors, on s’est dit que nos enfants devraient au moins avoir de la littérature dans leurs langues !

Vos livres sont donc édités dans les différentes langues parlées du Sénégal ?
La particularité des grandes langues transnationales au Sénégal sont partagées par tous les autres pays de la sous-région. Par exemple, pour le fulfuldé, c’est parlé dans 20 pays en Afrique, pour le mandingue c’est la même chose. Ce ne sont pas des petites langues en réalité.
Elles n’étaient pas prises en charge, mais marginalisées. Il n existait pas de militant conscient alors qu’il y avait un vrai travail à faire. Nous en tant qu’éditeurs, nous avons choisi de le faire et d’endosser ce rôle-là.

C’est votre militantisme à vous, donc défendre ces langues locales...
Oui. Personnellement je ne m’identifie pas à une seule langue, mais à des langues. L’Afrique est profondément multilingue aussi. Il y a le mandingue, le haoussa, le lingala, le swahili... Moi ça me parle. Ce sont des langues d’unité qui doivent être connues.

Existe-t-il un lectorat dans ce sens alors et se retrouve-t-il dans ces livres ?
Absolument. Je vous donne un exemple. Le professeur Abou Bakri Moussa Lam, qui a été l’assistant de cheikh Anta Diop, a publié chez nous trois livres. On est à la quatrième réédition de ses livres. Abou a écrit en français, mais il a aussi écrit en pulard, qui est la langue peule. Le peule a en fait plusieurs noms. On dit pulard au Sénégal et en Guinée, on dit fulfuldé au nord du Cameroun et au Mali, et foulani dans les pays anglophones. Mais c’est une seule langue.

Vous disiez tout à l’heure que vous regrettiez que ce soit l’Europe qui détient l’hégémonie sur la promotion de la littérature africaine dans le monde. C’est elle qui domine le marché de l’édition de la littérature africaine..
Oui. C’est évident. Il y a la domination politique qui est forcément liée à la domination économique et la domination économique ne peut pas perdurer sans la domination culturelle. Maintenant, la domination linguistique, c’est elle la catastrophe. Là, on perd son âme carrément !

Que faut-il faire d’après vous alors ?
Il faut résister. Quand on prend l’exemple de l’Irlande, cette dernière avait perdu sa langue. C’est à partir des bibliothèques qu’ils ont reconstitué leurs langues. La langue française, il a fallu que les Ronsard, du Bellay se battent pour la défendre !

Cela vous fait quoi que le Sénégal soit le pays invité d’honneur au Sila cette année ?
Pour moi c’est un plaisir. Je suis très attaché à l’Algérie. Je considère l’Algérie comme mon pays. Je le disais, l’année dernière quand je suis venu au salon, je fête chaque année le premier novembre. J’ai compris la révolution algérienne, son symbole, et sa portée. Tous ceux qui ont déclenché le premier novembre 1954 ont toute mon admiration et mon estime.

Vous êtes au Sila ce serait aussi l’occasion pour vous pourquoi pas de signer des accords de coédition Sud/Sud avec l’Algérie dans le sens de contrer cette domination étrangère…
Absolument ! Avec , Karim Chikh des éditions Apic, mais aussi les éditions Barzakh, nous sommes ensemble membres de l’alliance internationale des éditeurs indépendants. Il serait intéressant de rencontrer au moins ceux-là avec lesquels je suis dans la même association...

Pour conclure d’ éventuels partenariats ?
Absolument. Nous partageons les mêmes sensibilités. Je serai bien évidemment heureux de rencontrer les autres éditeurs algériens et même les auteurs. Et surtout ceux qui écrivent dans la langue amazighe. Je suis un militant de la langue amazighe. Même si je ne la comprends pas. Tout ce que je pourrai faire pour contribuer à la faire découvrir
je le ferai !

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