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La voix d’El Hasnaoui berce toujours

Il y a 17 années déjà, nous quittait Cheikh El Hasnaoui, considéré à l’unanimité comme l’un de nos plus grands chanteurs, non seulement pour sa voix et ses chansons mythiques, mais aussi pour ses textes qui font de lui, également, un poète hors pair. Un poète qui réussit à dire le maximum de choses avec si peu de mots bâtis autour d’images métaphoriques décrivant, avec l’exactitude qu’il faut ce que ressent El Hasnaoui au plus profond de son âme. Mais ce que ressentaient aussi pas mal d’Algériens à l’époque. Surtout les Algériens qui étaient emprisonnés dans les griffes de l’exil amer en France. Privés de leur terre natale, ils en rêvaient chaque jour et chaque nuit. Ce sont tous ces rêves, ceux de retrouver la chère taddart (village) un de ces jours après tant d’années passées à le pleurer. C’est cette déchirure et tant d’autres que Cheikh El Hasnaoui décrit et chante dans ses célèbres et immortelles chansons, aussi bien en kabyle qu’en arabe, comme Ya noudjoum ellil, Adrouhagh, La Maison-Blanche... Cheikh El Hasnaoui, au même degré que Slimane Azem, est sans doute le chanteur de l’exil. Et comment pouvait-il en être autrement lui qui a vécu plus de 80 % de sa vie loin de ce pays qu’il n’avait pas revu depuis plus d’un demi-siècle pour des raisons qui restent complètement méconnues. Des raisons qui font d’ailleurs l’objet de mille et une conjectures. Certains analystes l’imputent à une supposée histoire d’amour impossible avec une certaine Fadhma (titre de l’une de ses plus célèbres chansons). Il se raconte qu’après que Fadhma ait été «donnée» de force à quelqu’un d’autre, El Hasnaoui aurait juré de ne plus remettre les pieds ni dans son village (Taâzibt) près de la ville de Tizi Ouzou ni en Algérie. Mais il s’agit là d’une version qui n’a jamais été vérifiée. Le mystère reste tout entier concernant cet exil volontaire auquel s’est adonné El Hasnaoui malgré le désir ardent de retrouver le pays qui ne l’a jamais quitté pendant toute sa vie.
Une vidéo, le montrant en discussion avec Bahidja Rahal, démontre cette soif d’El Hasnaoui de retourner enfin dans son pays. Mais à aucun moment, il n’évoque les raisons qui l’empêcheraient de concrétiser ce qui représentait pour lui le rêve le plus cher. El Hasnaoui n’a jamais réalisé ce vœu. Il est mort en exil où il y est d’ailleurs enterré. Mais c’est à travers sa voix et ses chansons, d’une beauté extrême et d’une charge émotionnelle très forte, qu’il demeure présent partout en Kabylie où ses fans ne cessent de revisiter son œuvre. Non seulement il est un artiste très écouté, mais il constitue une école. Ses chansons ont inspiré et continuent d’inspirer les artistes qui sont venus après lui-même les plus talentueux. Kamel Messaoudi a même repris dans l’un de ses albums la chanson Ya noudjoum ellil. Quant à Matoub Lounès, il en a repris une infinité comme A mouh, a Muh, Ruh awin hemlegh, A yikhef-iw sans compter les chansons où il le cite nommément, en guise d’hommage, comme Adechnough ifenanen ou encore Andats taâzibt... De nombreux jeunes artistes en herbe ainsi que des chorales ne cessent de puiser dans l’œuvre musicale et poétique de Cheikh El Hasnaoui au moment même où on n’arrête pas de parler, à tort ou à raison, du recul de la chanson chaâbi et thématique. Est-ce vraiment le cas quand on constate que les chansons d’un artiste qui n’a pas produit de nouveautés depuis plus de soixante ans et qui n’est jamais monté sur scène demeure parmi les plus convoités par toutes les tranches d’âge de mélomanes ? Le mystère du succès éternel des chansons d’El Hasnaoui demeure entier. Autant que le mystère qui entoure sa vie et les raisons mystérieuses de son exil. De son silence. De son retrait. Et de sa profonde et indicible blessure.

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