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L’envers du décor

Kaddour M’Hamsadji et les rapports humains

L’amour platonique existe. Sans conditions matérielles. Avec une franchise jusqu’à la complicité qui « bétonne » le couple. C’est ce qu’on découvre en lisant « La Quatrième Epouse » !

Notes de lecture. De nombreux critiques littéraires se sont emparés du roman « La Quatrième Epouse » de l’immense homme de lettres algérien Kaddour M’Hamsadji. Difficile dans ce cas de prétendre y ajouter quoi que ce soit. Cependant, ce qui nous a frappés dans cette œuvre et qui n’a pas, à notre sens, été suffisamment relevé, c’est l’amour à l’état pur que l’auteur cisèle comme un diamantaire. Il nous entraîne dans sa description minutieuse des ressorts les plus profonds de la nature humaine. Dès les premières lignes du roman, on quitte le monde qui nous entoure, pour être happé par l’univers merveilleux des êtres qui s’aiment que Kaddour M’Hamsadji décrit comme nul autre. Il est vrai que sa bibliographie est très dense. Comme il est vrai que « La Quatrième Epouse » (éditions Casbah) complète un thème général abordé dans « Le Silence Des Cendres » et dans « Le Rêve Derrière Soi » du même auteur et publié respectivement en 2016, 1963 et 2000. Une si riche production est difficile à commenter en peu de lignes. Aussi, avons-nous fait le choix arbitraire de partager avec vous le ressenti après avoir fait « le voyage » à travers les 380 pages de « La Quatrième Epouse ». Dès les premières pages on est surpris par la force de l’écriture et cette précision d’orfèvre avec lesquelles Kaddour M’Hamsadji décrit ce qu’il y a de plus sublime dans les « rapports humains, plus largement, entre la femme et l’homme, entre les hommes et les femmes… ». On est surpris par tant de beauté de l’âme. Par tant de pureté. Par tant d’altruisme. Le chapitre de la « première épouse » laisse des traces chez l’être humain le plus blasé. Le personnage central du livre, Bakir Ghouzlani, est lycéen à Alger. Il vit à Birkhadem où son père possède une modeste ferme. Modeste par rapport au « ranch » mitoyen qui appartient à un colon des plus racistes qu’ait connus l’Algérie occupée. Nous sommes au début des années 1950. Il était rare, à cette époque, qu’un Algérien puisse accéder à des études aussi poussées. Il fallait beaucoup de chances, du travail, et des parents pouvant faire face aux frais d’études. Ils étaient tout au plus une poignée à travers le pays. Le chahid Didouche Mourad dont le père possédait une boulangerie était de ceux-là en ayant pu suivre ses études jusqu’au Lycée technique du Ruisseau (actuellement les Annassers). Donc Bakir vivait paisiblement sa jeunesse. Et puis, un beau jour, il fit une rencontre qui allait changer le cours de sa vie. Elle s’appelait Christine. « C’était Athéna-la déesse aux yeux pers…ô Dieu, très haut, qu’elle était belle…L’émotion faisait battre plus vite son cœur. » Elle portait un lourd cartable et était essoufflée en gravissant, lentement, la rue en escalier. Il eut le courage de s’arrêter à sa hauteur pour lui parler. Il apprend qu’elle aussi est lycéenne. Qu’elle prépare comme lui l’examen du bac. Qu’elle était chez sa grand-mère à Alger pour être proche de son lycée, mais vivait le reste du temps dans la ferme de son grand-père à Birkhadem. Que de points communs ! Avec ce bémol que son grand-père n’était autre que le colon raciste qui possédait un « ranch » près de leur ferme. Commence une histoire d’amour d’une rare profondeur. Christine savait que son grand-père n’aimait pas les « indigènes ». Elle ne pu s’empêcher toutefois de tomber, à son tour, amoureuse de Bakir. Ils réussirent tous deux au bac. Ils s’inscrivent tous les deux à l’Ecole normale d’instituteurs. Malgré tout ce qui les séparait, ils filent le parfait amour jusqu’à envisager le mariage. Une complicité à toute épreuve. Lorsque le grand-père de Christine apprend la nouvelle, il est hors de lui et projette de faire assassiner Bakir. Nous sommes au début de la Guerre de Libération nationale. Bakir rejoint le maquis où il a failli y laisser la vie. Il s’en sort avec des blessures handicapantes. Au maquis, il rencontre sa « deuxième épouse » une moudjahida qui tombe au champ d’honneur. A l’indépendance, Bakir décide de se remarier. Il aura trois enfants. Trois filles. Pas de garçons. En désaccord avec son frère, il se désole de ne pas avoir eu de garçon qui aurait évité à ses filles d’être spoliées, par la loi de l’héritage, de leurs parts au profit de leur oncle paternel. On ne vous en dira pas plus. Il faut lire cet ouvrage de Kaddour M’Hamsadji pour découvrir les méandres de la nature humaine. Où se mêlent les sentiments les plus nobles aux plus condamnables. Le titre peut prêter à confusion. Il n’est pas question de polygamie, mais du destin d’un homme que la vie n’a pas épargné. Un homme qui a eu des moments de bonheur, mais aussi qui a énormément souffert des travers qui traversent la société. Kaddour M’Hamsadji termine son livre par cette phrase pleine de sagesse. « Notre vie ne vaut que si nous résistons au destin contraire… » A lire (et à vivre) absolument !

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