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10ème FICA

Paix et engagement

Dénoncer la violence dans les guerres civiles et sortir de son mutisme de n’importe quelle façon est le thème dominant pour l’instant de cette édition.

Dimanche 10 novembre 2019. Une thématique semble bien s’affirmer au troisième jour des films en compétition, notamment au niveau des documentaires , mais aussi fiction où les guerres dans le monde sont au cœur des films. Que ce soit au Rwanda avec le film de Joel Karekezi, dans La miséricorde de la jungle, ou dans Fatwa de Mahmoud Ben Mahmoud où le réalisateur s’attaque au sujet épineux qu’est la montée de l’islamisme et sa radicalisation dans les pays arabes, et puis de la violence des états fascistes et de la responsabilité de chacun de lutter et sortir de son mutisme. Comme c’est le cas avec le documentaire espagnol Le Silence des autres de Almudena Carracedo et Robert Bahar. Le film prend comme point de départ l’année 1977. Deux ans après la mort de Franco, dans l’urgence de la transition démocratique, l’Espagne vote la loi d’amnistie générale qui libère les prisonniers politiques, mais interdit également le jugement des crimes franquistes. Les exactions commises sous la dictature et jusque dans les années 1980 (disparitions, exécutions sommaires, vols de bébés, torture) sont alors passées sous silence. Mais depuis quelques années, des citoyens espagnols, rescapés du franquisme, saisissent la justice à 10 000 kilomètres des crimes commis, en Argentine, pour rompre ce « pacte de l’oubli » et faire condamner les coupables. Non on ne pardonne pas ! Pas d’amnistie et pas d’oubli. En effet en 1975, l’Espagne sort de 40 ans de dictature et aujourd’hui ces rescapés de la mort dénoncent ceux qui se sont tus et n’ont rien fait pour faire arrêter cette barbarie.

L’horreur de la guerre
Le film nous plonge dans l’horreur sidérale, nous renvoyant à nos années de sang et de feu, durant les années de terrorisme et cette fameuse loi de Réconciliation nationale. Des atrocités sont citées, montrées énumérées. Poignant , le long métrage donne à entendre des témoignages bouleversants. Le film aborde cette question de la violence sans équivoque et dresse un réquisitoire contre la folie meurtrière des hommes. Dans un autre registre pas tout à fait identique mais qui rappelle combien une révolution ne tient qu’à un fil avec des lendemains souvent qui déchantent, est le film documentaire très personnel et intime de Mila Tua Mila Turajlic réalisatrice de L’Envers d’une histoire. Tout part d’une porte condamnée depuis trente ans dans un appartement de Belgrade, celui de sa famille. Un appartement divisé en deux dans lequel vivait de l’autre côté une autre famille. Cette situation reflète tout un symbole de l’histoire de la Serbie . Tandis que la réalisatrice entame une conversation avec sa mère, le portrait intime cède la place à son parcours de révolutionnaire, à son combat contre les fantômes qui hantent la Serbie, dix ans après la révolution démocratique et la chute de Slobodan Miloševiæ. Que reste-t-il des rêves révolutionnaires de cette Serbie-là ? Pas grand-chose. La réalisatrice avouera pendant le débat ne plus croire à l’engagement politique qui obligera toujours aux prochains décideurs du pays de faire un compromis avec l’ancien système. Là encore, toute ressemblance avec ce que vit le pays est loin d’être vaine ! Qu’importe, Mila reconnaît pourtant en les marches algériennes du vendredi cette forme d’enthousiasme révolutionnaire qu’elle a bien connu. Mais elle y porte cependant
un regard sceptique.

L’engagement autrement
«Je reconnais ce même enthousiasme ici en Algérie. Je sens la même énergie. Je regarde cela avec un œil cynique et désillusionné. Je pense que c’est une chose de faire chuter un régime et c’est tout à fait autre chose que de se mettre d’accord sur le genre de pays qu’on veut construire après» et d’avouer : «Je suis arrivée à un âge où j’ai commencé à regarder ma mère avec les yeux d’un adulte. J’ai compris qu’elle avait fait le choix de prendre la parole. Descendre dans la rue, c’était un choix. Je vous avoue que je n’arrivais pas à comprendre d’où ça venait. Qu’est-ce qui la poussait à prendre la parole en public ? D’où vient ce courage et cette conviction ?». La réalisatrice qui a fait des études en sciences politiques réalise qu’une autre forme de discours est possible. Une autre alternative s’ouvrait à elle : le cinéma, le langage cinématographique et ainsi elle s’emparera de sa caméra pour faire ce film qui lui a pris cinq ans. Un film dont la mère est au cœur du sujet. Un film tendre et tranchant qui donne à voir une femme terrible, anciennement professeureet militante jusqu’au bout et même si les révolutions échouent au final, confie-t-elle malgré tout «Cela prend beaucoup de temps, c’est pourquoi il faut toujours continuer la lutte !» dira-t-elle lors du débat. Mila fait un portrait, en effet, d’une femme pleine de nuances. Forte de caractère et d’une sagesse à la fois exemplaire. Une femme d’un calme aussi inouï, qui aime prendre son temps à faire luire et astiquer son service en cuivre, comme un précieux héritage qu’elle se plaît à préserver. Un peu comme toutes les femmes finalement. Enfin, une fiction cette fois, à savoir Desrances d’Apolline Traoré a été projeté dimanche soir à la salle Ibn Zeydoun. Un film dur qui évoque aussi la guerre ou comment cette violence va naître et s’intensifier. Au cœur de l’histoire de ce pays, celle de cette famille, dont la mère attend un enfant.

L’Afrique et ses démons
Le père obnubilé par le fait qu’il va avoir enfin un garçon, néglige un peu sa fille. Cette dernière sera amenée à réagir de façon plus qu’héroïque à maintes reprises et ainsi sauver son père de l’emprise d’un groupe de criminels libérés de prison. Si la violence bien évidemment stigmatisée, un autre thème est évoqué en filigrane, est celui de la préférence souvent des garçons au détriment des filles dans les familles africaines. Apolline Traoré parvient à tordre le coup à cette idée avec brio. «Ce festival est très bien important pour moi parce que je suis une cinéaste engagée. Non seulement envers le combat des femmes, mais aussi envers tout ce qui se passe dans nos sociétés africaines aujourd’hui. J’ai décidé de prendre ce flambeau-là, m’attaquer à ça à ma manière, avec ma vision des choses et mon ressenti. Je n’ai pas grandi dans mon pays, ni en Afrique. Mais quand je suis revenu, le choc culturel entre les USA et l’Afrique m’a évidemment beaucoup marqué. J’avais l’impression d’être complètement sur une autre planète. Pourtant, j’étais chez moi. J’ai décidé de parler de chez moi avec les outils qu’on m’a donnés en Amérique. J’ai réalisé ce film en Côte d’Ivoire, à côté de chez moi.»

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