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Amira Hilda, actrice et comédienne, à l’Expression

«Papicha a changé notre vie»

Elle fait partie de ces comédiennes qui se sont fait remarquer ces dernières années. Discrète, mais talentueuse, enchaînant les rôles, de 2018 avec le film Les Bienheureux de Sofia Djama puis en 2019 qui l’a fait apparaître dans de nombreux rôles, notre actrice en herbe, passionnée de théâtre et du verbe aussi, n’a pas fini de faire parler d’elle. Rencontrée lors du festival du film engagé où elle participait dans un court métrage intitulé Hadi Hiya, nous en avons profité pour lui poser quelques questions. Rencontre avec une artiste caméléon...

L’Expression : Dans le cadre du Festival international du cinéma d’Alger, vous avez participé dans un court métrage de Youcef Mahssas intitulé Hadi Hya dans lequel vous interprétez le rôle d’une femme assez spéciale. Un mot tout d’abord sur votre rôle…

Amira Hilda : J’interprète le rôle de Sarah. Une femme qui a assisté au massacre de sa famille. Elle est la seule survivante, elle et son oncle. Elle a vécu avec son oncle. Elle a souffert de l’absence de la présence parentale. Elle n’avait pas de protecteur dans sa vie ; quand elle s’est mariée avec Lyes, elle a cru trouver cette âme protectrice, le prince charmant. Au final, ce Lyes s’est avéré un lâche, un escroc qui fuit ses responsabilités. Il doit de l’argent à beaucoup de monde. Il ne fait pas face à ses responsabilités.

Votre personnage affirme vouloir être elle-même...
J’ai essayé de personnifier une chose dont souffrent beaucoup d’Algériens. Nous avons un gros problème d’identité. Chacun veut imposer à l’autre son identité. Toutefois je ne généralise pas. L’Algérie a souvent été colonisée. On n’a pas connu une Algérie indépendante vraiment jusqu’à présent. L’Algérie est multi-identitaire. On n’arrive pas à l’accepter. Cette femme a connu la décennie noire puis voit à nouveau sa vie basculer avec cet homme, alors que tout ce qu’elle voulait c’est d’être elle- même. Elle refuse qu’on lui impose quoi que ce soit. Son mari lui impose indirectement d’être quelqu’un d’autre aussi. Elle se force à le supporter. Si elle était elle-même, elle serait sans doute partie, mais elle ne peut pas, car elle a une fille. Elle a découvert la vraie nature de son mari trop tard. Elle ne peut pas le quitter et elle n’arrive pas à être elle-même et s’épanouir en tant que personne à part entière.

Votre personnage est assez énigmatique. Aussi, vous parvenez à passer avec aisance d’un moment de calme à un déchaînement hystérique. On sent la montée d’adrénaline. Un mot sur la direction d’acteur. Un rôle profondément psychologique…
Sarah rentre dans une sphère de folie. C’était un travail très p profond effectivement. J’ai eu le scénario trois ans avant le tournage. On en a parlé avant. durant ces trois ans je n’ai pas travaillé que le scénario, mais j’ai eu le temps de me documenter, voir quelques reportages, me renseigner, regarder des témoignages, pour comprendre la réaction d’une personne traumatisée... Comme on a l’habitude de dire, à propos du film Papicha, on n’a pas connu cette période. On n’a pas eu de contact direct avec les attentats de la décennie noire. J’étais bébé, je suis née en 1991. J’étais à Sétif. J’ai lu des livres, notamment celui de Nora Shérif, Dévoilée. Où elle décrivait les atrocités auxquelles elle a assisté.

2019 a été très riche pour vous sur le plan cinématographique puisque on vous a vu partout, notamment dans Les Bienheureux de Sofia Djama en 2018.Puis vous avez enchaîné cette année avec les courts métrages Point Zéro de Nassim Bouamza, Touiza de Karim Bengana et dans le long métrage Papicha qui a fait le buzz, en raison de sa censure, notamment …
Malheureusement ! On aurait aimé qu’il fasse le buzz autrement...

Avez-vous une raison ou une explication à nous fournir quant à son interdiction en Algérie justement ?
On ne sait pas pourquoi il a été interdit de sortie en Algérie. Alors que le film était programmé, nous avons reçu un mail de la part du Cadc, quelques jours avant indiquant que l’avant-première a été annulée. Même les gens qui y travaillent ne savent pas pourquoi. Jusqu’à présent on ne sait pas qui a décidé de sa censure. Et c’est dommage. Comme je le dis à chaque fois, on aurait aimé partager ce film avec les Algériens. Que les retours soient positifs ou négatifs, c’est un film qui nous appartient, peu importe si le public aurait été d’accord ou pas avec Mounia Meddour, après tout, débattre avec les Algériens, c’est mieux qu’ailleurs. Il a été tourné ici. Il raconte une histoire qui s’est passée ici et qui plus est, raconte une grande partie de l’histoire de Mounia. Le producteur lui, non plus , n’a pas de réponse. Belkacem Hadjadj, se bat pour que le film soit projeté ici, que le débat ait lieu ici.

Comment avez-vous appréhendé votre rôle dans Papicha ?
Au début je devais camper le rôle de Wassila. Il été finalement interprété par Shirine Boutella, qui joue le rôle de la meilleure amie de Nedjma dans le film. Quand j’ai passé le casting, Mounia me voyait beaucoup plus dans le rôle de Samira. Elle voyait un truc innocent en moi. Samira est une fille pieuse qui aime sa religion, en même temps elle aime la culture, les mots, le rap... Elle est naïve. Elle allait se marier avec le copain de son frère, quelqu’un de très dur. Il lui demandait d’arrêter les études, de rester à la maison. Elle a rencontré un étudiant qui lui a promis la lune. Il a eu ce qu’il voulait d’elle et il l’a laissée tomber. Il l’a fait rêver...

Un mot sur les coulisses du tournage de Papicha?
Ce qu’il faut savoir c’est qu’on a habité pendant plus d’un mois ensemble. Lyna Khoudri, je la connaissais déjà car nous avions joué ensemble dans Les Bienheureux. Zahra Doumandji je la connaissais à travers les réseaux sociaux. Shirine aussi. On répétait chaque jour. On rajoutait des choses au scénario. On enlevait d’autres. Personnellement, j’ai écrit une chanson pour le film que j’ai interprétée aussi, à la fin du long métrage, et que l’on entend juste avant le générique. Il s’agit de «Foustan el hourya».

Vous aimez les mots car vous êtes slameuse aussi. Vous êtes comédienne au cinéma, mais aussi au théâtre. Votre autre passion ?
Effectivement. Mais je n’ai pas fait une école de théâtre. Quand je déclamais mes poèmes, j’aimais vivre les mots. La gestuelle avait une grande place dans mes prestations. Un jour, on m’a repérée au théâtre. J’ai commencé à en faire. Là, actuellement j’ai un spectacle qui se prépare. J’ai entamé ce dernier il y a un an, je suis en train de le reprendre. C’est un one-woman- show, mis en scène avec Lamri Kaouane. Il durera quinze minutes. Ça parle d’une sage-femme qui est dégoûtée dans son travail. Elle n’est pas mariée et voudrait avoir des bébés. Elle traite mal ses patientes par ce qu’elle est jalouse d’elles. J’incarne plusieurs personnages. Elle va regretter à la fin la façon dont elle traite ses patientes. A un moment donné, elle essaye de faire comprendre aux gens qu’elle ne veut pas être comme ça...

Papicha a triomphé dans pas mal de festivals. Vous avez reçu de nombreux prix. Vous attendiez-vous à ce succès fulgurant ?
Oui on a reçu tellement de Prix que Mounia s’est mise à demander qui d’entre nous voulait aller récupérer tel ou tel prix ! ( rire). Franchement, non ! Je ne m’y attendais pas. Il y a un an et demi on ne s’imaginait pas trop Papicha à Cannes. On en rigolait. Après, on s’est retrouvé au festival de Cannes. On ne s’y attendait pas vraiment ! C’était un choc.
On était un peu perdu. A Cannes c’était le marathon. On a couru parce que c’est une vraie machine avec les interviews etc. On ne s’y attendait pas. Grâce à ça, on a acquis une certaine expérience. C’était stressant. Mais franchement Mounia a changé notre vie. Elle nous a tout donné. Je remercie vivement Mounia Meddour et même les filles. On a travaillé ensemble. On a été généreuse les unes envers les autres. C’était un vrai travail d’équipe. Il n y a pas eu de problèmes.

Comment voyez-vous la suite de votre carrière d’autant qu’on vous colle l’étiquette de la fille «exigeante» ?
Je ne suis pas si exigeante que ça. Je veux juste travailler dans les normes. J’ai l’impression qu’ici quand on veut travailler dans les normes, on te colle justement cette étiquette d’exigeante.
Or, ici je ne peux pas vraiment être sélective vu qu’il n’y a pas beaucoup de productions. Je veux qu’on sorte de la mentalité des clans. J’ai l’impression que si on ne fait pas partie d’un clan ou d’un autre, on ne peut pas réussir et c’est vraiment dommage.

Si vous aviez enfin, à incarner un rôle au cinéma, quel serait-il?
J’aimerai incarner au cinéma la vie de Dalila Hlilou. C’est mon actrice préférée. Ma comédienne de théâtre préférée aussi. C’est un monstre sur scène. Un biopic sur elle serait extraordinaire. Sinon, sur le plan international mon modèle au cinéma est incontestablement Louise Brooks. Elle a fait des films muets. J’aime beaucoup cette actrice.

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