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Amazighité, arabo-islamisme et identité

Parlons-en sans complexe ni rancune

Il court dans toutes les bouches des acolytes du système que les Amazighs ont beaucoup fait pour la langue arabe et l’islam, mais en retour, qu’ont-ils fait pour eux et leur amazighité ?

Le concept d’assimilation coloniale a fait l’objet de multiples études historico-politiques, allant de la recherche de sa paternité, de son usage politique comme moyen discrétionnaire de mener la guerre, à ses impacts sur les rapports de domination et de hiérarchie des structures sociales des post-indépendances.
La notion d’assimilation est lourde d’exo-cannibalisme guerrier dont usent à merci les fachos de tout système d’oppression : assimilation à une économie politique, à une identité exclusive ou chimérique, à une histoire hors sol..., inassimilables vous êtes, ennemis intérieur ou extérieur, on vous désigne.
Dans le cas de l’Algérie, l’héritage assimilationniste est hissé au rang d’un mouvement idéologique ayant pour objectif l’anéantissement de tout particularisme culturel, linguistique et anthropologique. Il est établi sur des rapports de dominant-dominé dont l’imprégnation devient la condition sine qua non d’accès de nos cadres à la classe dirigeante, consolidant ainsi ce trépied d’un Etat tyrannique ajouté à la rente financière et la légitimité-légalité.
Loin de la foi sincère et intelligente, de la quête de sens à l’existence individuelle, tout ce qui s’opère autour de cet esprit idéologique arabo-islamique, allant de la « taqiyya au nifaq », est une mise en scène trompeuse non seulement pour les Algériens, mais pour tous les peuples arabes.
Le premier terme, « arabo » que j’estime débarrassé de toute référence ethnique et identitaire de nos amis arabes, s’applique à une langue, l’arabe classique, incompris des masses populaires depuis toujours, non comme langue d’échange libre et de rayonnement, mais comme support sacralisé véhiculant un matraquage cérébral en permanence. Et quand bien même pris dans son acception identitaire en admettant qu’on soit tous arabes ou qu’on le soit devenu : un Arabe est-il indéfiniment condamné à la minorité, jugé indigne de jouir de ses droits civils et politiques et incapable de penser librement pour prendre dignement son devenir en main ?
Les langues se valent dans leur essence. Le venin des confréristes est dans l’esprit, non pas dans la lettre. Le deuxième terme est carcéral, annihilant et aliénant la libre pensée.

Toujours dans la même logique


L’avènement des confréries musul manes, asservies et financées par l’ex-ministère des Cultes français dans les années vingt et trente, est une étape qui me paraît charnière dans la construction d’un mur fictif, mais indémontable entre la société de cour et les gens du peuple pour lesquels on a bricolé tous les traits qui les constituent à l’heure actuelle. Toujours dans la même logique de démoralisation et de déracinement si chère à l’ex-puissance coloniale, l’esprit arabo-islamique, avec sa duplicité et son angélisme, a constitué la cage de Faraday d’un néocolonialisme des plus fins du XXIe siècle.
Manipulé à merci par la géostratégie du général Bonaparte, cette dernière somme tous les historiens de la Méditerranée à écrire par commande, et se couler en dateurs de tout un pan de l’histoire de l’humanité que l’on dépossède de son anthropologie, comme si l’émergence de la dimension amazighe allait générer des séismes de tout ordre.
Les congréganistes musulmans dits « oulémas », en adoptant un socle de pensée tiède et complaisante à l’égard de l’Empire, organisèrent la fracture originelle dans la genèse du Mouvement national algérien dont les piliers se sont formés dans les milieux ouvriers marxiens des usines de France et non dans les zaouïas de Kabylie comme le pensaient certains.
Il court dans toutes les bouches des acolytes du système que les Amazighs ont beaucoup fait pour la langue arabe et l’islam, mais en retour, qu’ont-ils fait pour eux et leur amazighité ?

Au contraire, on a décimé tous ceux qui s’en réclament.
Des insoumis et incorruptibles de 1949 aux insurgés de 1963 en passant par les soummamistes, ainsi que ceux de 1980 et du printemps noir de 2001, tous ont été montrés comme ennemis de la nation et leur liquidation physique a été orchestrée comme une nécessité première à la progression de cette idéologie arabo-islamique, rehaussant ses héritiers au rang de la caste dominante à l’image de leurs aïeux.
En féodaux éclairés et en idéologues ambitieux, les confréristes arabo-islamistes se sont fondus dans la mère patrie de la puissance coloniale.

La déclaration des droits de l’homme

Des valets de chambre des turcs au cortège de légions d’honneur, ils furent amenés au rang de notables en épousant la même terminologie de leurs maîtres, qualifiant le peuple d’indigène et d’inassimilable, et combattirent en lui cette fibre révolutionnaire comme seul viatique que possédait le peuple contre l’oppresseur. Pis encore ! Se désintéressant du sol, de la liberté du peuple et de son histoire, ces nantis ont brandi l’étendard arabo-islamique comme seule cible de la conquête coloniale et ainsi, dépossédant le peuple de son statut de colonisé-combattant, ils se sont attribués la lutte pour en faire la leur seuls. Vous avez l’art de vous attribuer l’héroïsme de vos opposants et la manie de la culture du bouc émissaire. N’est-ce pas un nazi qui a dit : « Pour faire un peuple, il faut lui créer un ennemi. »
Cette chimère s’entêtant à créer une nation ex-nihilo est démontée, démentie par l’anthropologie historique du lien social et culturel du peuple algérien, de ses villages à ses villes, de ses montagnes à ses oasis.
Que viennent-ils faire, encore une fois, au sein de ces mouvements ? À quel abreuvoir vont-ils encore nous
attacher ?
Il y a quelques années, loin des minarets et des incantations quotidiennes, j’ai aperçu un ex- ministre du gouvernement algérien sortir de l’un des hauts lieux français de l’art et de la culture, l’opéra Garnier, tout beau, mis sur son 31 et coiffé à la Céline. Tout d’abord j’ai ressenti une fierté démesurée à son égard, puis frénétiquement de multiples questionnements m’assaillirent. Combien d’opéras et de théâtres a-t-il construit pour nous enfants sous ses ministères ?
Combien de générations ont péri sous ses injonctions à l’esprit confré riste arabo-islamique ? Et quand on apprend que c’est grâce à un pasteur que la liberté de conscience fut inscrite dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen sur cette terre de France, je me dis que vous nous avez nourris de cette part du diable dans l’œuvre de Dieu. Comme quoi nos responsables politiques possèdent un savoir, mais pour eux-mêmes, et une finesse d’être radicalement en inadéquation avec leurs prêches à l’usage du peuple. Ils désignent tout esprit rebelle à leur vision du monde de « hizb frança ».
Attaché au piquet azhariste et saoudien, jurant allégeance à la maison mère, la priorité de cet esprit arabo-islamique n’est pas de protéger les droits et les libertés de chacun ou d’endiguer la déchéance matérielle des défavorisés, mais d’ajuster et de réajuster sans cesse ce costume idéologique hors-sol à la personnalité algérienne dans un état de vassalité permanente en couvrant la spoliation la plus inédite au monde.
Qui s’entête à court-circuiter la volonté du peuple en jetant ses aspirations dans une broyeuse électorale qui traiterait du normatif sur un
terrain évacué de ses garde-fous institutionnels ?
Qui a peur d’une Assemblée constituante comme procédure fondatrice où siègeraient les dignes porte-voix du peuple ainsi que des personnalités politiques n’ayant jamais pris part à l’exercice du pouvoir dans les hautes sphères de l’État ? Qui cherche à brouiller l’expression de la volonté générale du peuple à se doter de sa première législation dont il est seul l’auteur ?
Ce sont les assimilés et les charognards à becs inépuisables picorant les miettes sur le sillage de la razzia.
L’aspiration essentielle des mouvements actuels est l’effondrement de ce corps tyrannique dont l’arabo-islamisme est l’esprit. État-nation, maison des Dieux. Tout est là, circulez ! Il n’y a rien à penser. Nul besoin de démocratie ni de liberté. Cet esprit passe-partout ferme à double tour sur ses vérités absolues et fait élire de lui-même, il suffit d’en porter le sceau.

Ouahcène Yahiaoui /  Universitaire

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