Tebboune Président, le choix du coeur et de la raison
Tebboune réélu avec les honneurs, c'était écrit dans son bilan. Dans sa destinée d'homme au long cours, au long souffle, au grand coeur qui met la fraternité au-dessus de tout. «Il a bon coeur, et c'est rare en politique. Il a aussi de l'humour qui est la forme la plus achevée de la modestie», me confiait il y a quelque temps un homme qui a servi l'État à un très haut niveau. De cette modestie, si peu courante en politique, on en a eu un aperçu lors de ses meetings à Constantine, Oran, Djanet et Alger. Sans doute, cette valeur, car c'en est une, cette humilité est-elle passée inaperçue aux oreilles des salles surchauffées par la ferveur, mais pour l'observateur qui suit le candidat Tebboune, qui écoute ce qu'il dit, comprend et compare ses paroles avec d'autres candidats d'autrefois, il ne peut s'empêcher de se dire qu'il connaît si bien son peuple pour lui parler comme s'il était le plus humble de ses serviteurs. Mais trêve de paroles. Voici le candidat avec la phrase qui le distingue et l'honore: «Si vous me donnez votre confiance une nouvelle fois...» Avez-vous bien entendu? «Si vous me donnez votre confiance une nouvelle fois...» Voyez-vous, là où d'autres candidats auraient roulé des mécaniques s'ils avaient disposé de son bilan plus que flatteur, lui restait dans la peau du challenger pour qui rien n'est acquis d'avance. Et jusqu'à la dernière minute, jusqu'au jour des élections, il ne se départira pas de cette humilité sous le regard paternel d'Abdelkader dont le portrait tapisse le mur du bureau de vote avec cette devise: «Que vive la nation algérienne indépendante!» Là aussi, ce n'est pas un hasard si le portrait de l'Émir se trouve dans ce lieu. En vérité, Abdelmadjid Tebboune inscrit ses pas dans ceux de deux leaders qui ont sacrifié leur vie pour l'Algérie: Abdelkader et celui qui l'a rapatrié en terre de ses ancêtres: Boumediène. L'un est un saint, l'autre porte le nom d'un saint, Sidi Boumediène qui repose à Tlemcen.
En seulement un mandat écourté d'ailleurs de deux longues années à cause de sa maladie et du Covid - on oublie souvent ces contraintes majeures -, Tebboune a réussi à insuffler un sang nouveau à ce grand corps malade qu'était l'Algérie si bien qu'elle ait pris place parmi les économies les plus dynamiques d'Afrique. C'est un avant-goût de ce que sera le second mandat qui permettra sans aucun doute à notre pays de faire un bond économique et sociétal qui l'imposera définitivement comme économie émergente dans le monde. Il suffit d'un homme, d'une volonté et de la rencontre de cet homme avec le peuple. On y est. Et il faut s'en féliciter car les hommes d'État en Algérie ne courent pas les rues. À chaque fois que je vote, je ne peux m'empêcher de penser - allez savoir pourquoi - au premier face-à-face à Cordoue entre deux génies: Ibn Rochd dans la maturité de son art et de sa science et le jeune Ibn Arabi dont le précoce génie de ses quinze ans lui conférait déjà une certaine audience. Le premier dit au second: «Oui?» Le second répond: «Oui!» C'est ce oui, cet assentiment sans condition pour le vote que doit avoir à chaque fois tout Algérien. Oui, toujours oui pour l'Algérie; dire oui comme Ibn Arabi, le maître d'Abdelkader. Alors, oui à Tebboune pour cinq années qui s'annoncent prometteuses et que lui-même qualifie de décisives.
Le vendredi est le jour où la nostalgie des disparus s'empare des vivants. Et quand ceux qui ont survécu aux grands défunts d'hier sont toujours parmi nous, il est important de leur manifester le respect, la gratitude et l'admiration qui leur sont dus. C'est pour cette raison que ce vendredi, veille des élections, j'ai décidé de rendre visite à l'un des derniers grands ministres de Boumediène et Bendjedid, un homme qui a affronté Camus, à fleurets mouchetés, alors qu'il avait la vingtaine, affronté la prison coloniale au même âge, subi les geôles de Ben Bella avant de devenir grâce à ses mémoires, au style remarquable, l'un des meilleurs témoins de l'Algérie de sa guerre d'indépendance aux élections de 1999. Dès l'entrée de sa maison, j'ai senti l'odeur du cigare. C'est bon signe, ai-je lancé à son aîné Bachir, aussi élégant et convivial que l'est son père. C'est un trait de famille. Cela veut dire qu'il était en forme et toujours bon pied, bon oeil à 92 ans, ai-je pensé. Comme à son habitude, l'ex-ministre des Affaires étrangères est peu loquace. Il écoute plus qu'il ne parle. Leçon apprise de son père, le vénérable cheikh Ibrahimi dont le portrait orne la pièce où il reçoit. De quoi parle un ancien ministre des Affaires étrangères? De l'Algérie et de son environnement extérieur: «Les dangers nous guettent de toutes parts. Il faut un front commun intérieur pour y faire face.» L'Algérie n'est vraiment forte que rassemblée et unie dans un monde qui se défait sous nos yeux. Taleb-Ibrahimi ne dira rien de plus. Il médite au milieu de ceux qui lui rendent visite, non pour l'entendre parler mais pour le voir comme on voit un sage dont la seule présence rassure. Après avoir écouté son silence longuement, nous primes congé de lui. De lui, il nous reste ce parfum d'hier d'une période qui a marqué le coeur et l'esprit de tous les Algériens qui mettent la liberté, le «nif» et la défense des causes justes au-dessus de tout. Rassurons-nous. Abdelkader et Boumediene peuvent reposer en paix. Le flambeau est entre de bonnes mains, celles d'un authentique Algérien qui met le peuple au-dessus de tout. Dans une Algérie toujours victorieuse. Inch'Allah.