Le raï algérien est menacé !

Le raï a fait, et continue à faire, le bonheur de toutes et tous les Algériens. D'Oran à Tizi Ouzou, en passant par Sétif, Annaba et Béchar, la chanson raï était toujours la voix vibrante des fêtes, toutes les fêtes des noces, en passant par les fêtes nationales jusqu'à la circoncision.
Le raï est un art national rassembleur.
Par son rythme musical spécifique, par ses paroles rebelles, par son souffle humain et par son courage, le raï a été toujours, pour les Algériennes et les Algériens de la classe populaire marginale mais, aussi, pour les autres classes sociales, la voix de la liberté, de la justice et de l'amour.
Si le raï est le produit des enfants issus des quartiers pauvres, il s'est libéré de cette appartenance sociale pour devenir une voix humaine commune et générale.
Le raï est patrimoine national vivant, ardent.
Le raï est une voie sûre et porteuse pour le tourisme international culturel et artistique inégalé, dans un pays grand comme l'Algérie connu par sa diversité linguistique et culturelle. L'Algérie, il faut le rappeler, est le pays de l'allégresse chantée, à travers l'histoire, par des voix immortelles de Cheikha Remiti, d'Idir, d'Aït Menguellet, de Rabah Dariassa, de Larbi Bensari, d'Abdelkarim Dali, de Matoub Lounès, d'Ahmed Wahbi...
Le raï, il faut le rappeler, représente pour l'Algérie moderne un investissement économico-culturel rare.
Un capital mal exploité. Il est écouté et aimé dans les quatre coins du monde, du Japon jusqu'à l'Afrique du Sud.
Le registre du raï est distingué par une pléiade d'artistes renommés qui font la fierté de notre pays, loin de tout jugement politique ou moraliste, Cheikha Remiti, Cheb Bellemou, Cheba Zahouaniya, Cheb Benchennat, Chaba Fadhila, Cheb Khaled, Cheb Mami, Cheb Rachid Taha, Cheb Hasni...
En 2022, le raï, genre musical algérien, a été inscrit par l'Unesco sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité.
Cet évènement était une fierté pour tous les algériens attachés à ce patrimoine populaire algérien enraciné dans les couches sociales les plus démunies.
Mais depuis 2022, qu'est-ce qu'on a fait pour la promotion du raï? Le raï est menacé par un silence complice!
Avec amertume, je le dis, jusqu'à maintenant, nous n'avons pas pu créer un vrai festival international consacré au raï.
Le raï vit dans son pays comme exilé ou mal vu!
Et au moment où le raï, chez nous, dans sa terre natale, vit une sorte de guéguerre enfantine entre les gens d'Oran et ceux de Bel Abbès, à propos de qui a le droit et la priorité d'organiser un tel festival, au moment où quelques voix puristes moralistes n'arrêtent pas d'attaquer les paroles de la chanson raï afin de la faire enterrer ou la faire taire, nos voisins de l'Ouest nous ont volé notre patrimoine.
Profitant de notre situation indécise et lente, ils ont organisé un festival international consacré au raï dans une ville frontalière!
Un festival animé entièrement par les artistes algériens ou par les reprises du répertoire classique de la chanson et de la musique du raï algérien.
Le raï, avec tout ce qu'il a de prestige international, de présence universelle et d'avenir artistique évident, a besoin d'un savoir-faire algérien dans le domaine économique, culturel, pédagogique et touristique pour le rendre rentable dans son pays d'origine.
Après son inscription sur la liste du patrimoine algérien de l'humanité par l'Unesco en 2022, le raï a besoin d'un projet bien réfléchi qui peut donner à l'Algérie une dimension culturelle et artistique internationale.
Le raï a besoin aussi de la création d'un centre de recherche afin de sauvegarder ce patrimoine et d'aider les chanteurs et les musiciens de la nouvelle génération qui ne cessent de redynamiser la scène artistique nationale et internationale.