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Coup de poker

Abdelaziz Belkhadem a été clair: les affirmations du Washington Post et du New York Times sur l´envoi de troupes algériennes en Irak sont dénuées de tout fondement. La philosophie de l´armée algérienne est constante: sa mission consiste à défendre l´intégrité territoriale et ce n´est pas aujourd´hui qu´elle va changer. Mais surtout, pourquoi aller en Irak? Un pays que viennent de quitter les contingents de l´Espagne, du Honduras, des Philippines... Le bourbier irakien est en passe de devenir un nouveau Vietnam et dans ce genre d´aventures, bien malin qui peut prévoir de quoi sera fait l´avenir. Un mois après la passation des pouvoirs au gouvernement d´Iyad Allaoui, l´horizon est toujours bouché: les attentats sont de plus en plus meurtriers et les ennemis ne sont toujours pas identifiés. Saddam Hussein, qui était considéré comme l´ennemi public numéro un et comme le chef de la résistance, est en prison. Il écrit des poèmes et fait du jardinage.
C´est désormais le Jordanien Zerqaoui, adjoint de Ben Laden et cerveau des attentats, qui prend la relève comme ennemi public numéro un en Irak.
Pratiquement, tous les adjoints de Saddam Hussein, dont les têtes étaient mises à prix et qui faisaient partie d´un jeu de cartes gracieusement distribué par Rumsfeld aux GI´s, sont derrière les barreaux. Les fils et le petits-fils de Saddam ont été tués lors d´un accrochage avec les forces de la coalition. Tous les joueurs de cartes vous le diront : quand on engage une guerre sur un coup de poker, il faut envisager les deux éventualités: perdre ou gagner. Les Faucons du Pentagone, déjà leurrés par les informations distillées par les services d´espionnage et de renseignement, FBI et CIA réunis, ont sous-estimé le bourbier irakien qui s´annonce comme un nouveau Vietnam. Mais, alors que ce dernier était soutenu par la puissante armée rouge et le Pacte de Varsovie, c´est un réseau islamiste formé et financé par la CIA en Afghanistan qui mène la danse. Il y a donc à la fois du cynisme et une ironie du sort à aller en guerre contre un ennemi invisible qui connaît votre tactique et votre talon d´Achille.
Les Etats-Unis, qui sont une grande puissance fortement armée, ont tablé sur une guerre éclair. La victoire sur le régime de Saddam Hussein a été effectivement très rapide. Trop rapide même. Il ne fait aucun doute que le rapport des experts sur les services de sécurité et la campagne pour les présidentielles de novembre prochain amèneront les équipes Bush et Kerry à peaufiner leur stratégie et à ne plus jouer l´avenir de toute une région à pile ou face.
Les réseaux Al Qaîda, cela fait près d´une décennie que l´Algérie leur fait la guerre. Elle connaît leurs méthodes. Elle est même associée avec les Etats-Unis dans la région du Sahel contre eux, surtout depuis la prise d´otages par Abderezak El Para. S´il y a une leçon à tirer de l´expérience sanglante algérienne; c´est bien celle-là : la violence nourrit la violence. La même cause produisant les mêmes effets, il arrive un moment où la violence prend des proportions considérables et où elle perd sa couverture politique. On voit alors apparaître toutes formes de criminalités: mafia, grand banditisme, règlements de comptes. Mais si l´armée, la société et les institutions de l´Etat tiennent bon, vient alors le moment où la violence commence à péricliter, à diminuer en intensité. Il en va de la guerre civile comme de tous les autres phénomènes de violence. Elle naît, se répand comme une tache d´huile, connaît des pics inquiétants, et puis vient le répit, plus ou moins long, comme les vagues dans la mer après la houle.

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