Couple brisé et droit de garde
Le président de la chambre correctionnelle d'Alger était plutôt joyeux de reprendre du service, en ces jours de fin de vacances écourtées pour la bonne cause.
La salle d'audiences n'affichait pas complet, car les estivants semblent encore assommés quatre jours après la clôture de l'été 2024.
Les deux conseillers ont retrouvé de jolies couleurs et la joie de travailler qui n'aura pas à intervenir ce jour -là car honnêtement, il n'y avait pas de quoi fouetter un chaton du fait même de l'absence des ténors du barreau d'Alger qui voient le congé se prolonger surtout que les week-ends sont vite au rendez-vous!
L'affaire qui a retenu l'attention vers les quatorze heures dix mettait aux prises un couple qui s'est présenté en mille morceaux, à la barre pour une triste et grave histoire de non- représentation d'enfants à la mère frustrée de ne pas bénéficier du droit de visite qui est en soi un acte indigne quel que soit le motif.
D'abord, il n'y avait qu'à voir la tronche qu'avaient les anciens amoureux pour comprendre de suite que l'amertume était la maîtresse des lieux! Madame regardait à gauche, du coin du parquetier et Monsieur lorgnait la greffière, du côté opposé!
La juge, elle, promenait son regard sur toute la surface de la vaste salle d'audiences clairsemée! Oulfa. H. et Abdelqoudous. L. ont fait des enfants sans savoir qu'ils allaient en faire des victimes.
Des enfants de la haine et du mépris de l'Autre, telle semblait être, la sérénade de ce couple désarticulé par des scènes de ménage, à ne plus en finir.
Les deux conseils sont là, attentifs, mais surtout vigilants à ce qui se dit à la barre, souvent dans «le n'importe quoi»! Ils sont à côté de la casserole de lait sur le feu, et à la moindre alerte, ils sont prêts à toute éventualité pour tenter de sauver ce qui peut l'être.
Le couple désagrégé ne parle qu'à demi-mots et selon sa manière de faire, la présidente qui a fait ses armes sous la houlette de ses fameux aînés de collègues!
Les règlements de comptes et autres coups sous la ceinture peuvent attendre! Pour l' heure, il est question de non-présentation d'enfants à la maman qui n'a, finalement, que la justice à qui s'adresser, et régler le conflit car c'en est un, et un gros!
L'article 327 du Code pénal dispose que:
«Quiconque, étant chargé de la garde d'un enfant, ne le représente point aux personnes qui ont le droit de le réclamer, est puni de l'emprisonnement de deux à cinq ans.»
Heureusement que le parquetier de permanence qui a pris le soin de choisir cet article, aurait pu noter l'article suivant qui est moins incisif que le 327!
L'ex-épouse faisait une de ces têtes, on ne vous dit pas, mais alors pas du tout. Vous imaginez la tronche de Madame à la barre, surtout lorsque l'ex-mari parle, vous vous demandez alors sur place qu'est-ce qui a bien pu rassembler ce couple qui vraiment n'a rien à voir l'un avec l'autre: physiquement, d'abord; psychologiquement ensuite, car on se pose des questions sur le comment cet ex-couple a bien pu vivre ensemble huit années avant de se quitter avec pertes et fracas, alors que le plus simple aurait été de se dire adieu sans encombre en pensant d'abord aux enfants, à leur avenir, et non à passer le plus clair de son temps entre le somptueux bureau du parquet, et les cabinets d'avocats. Ils sont là à chercher noise au conjoint, histoire de l'embêter, et lui rendre insupportable, la vie!
Entre-temps, la présidente voulait se débarrasser au plus vite de ces deux êtres venus au Ruisseau, non pas pour se désaltérer, mais plutôt, régler leurs comptes. O.K.! Mais pas au détriment des gens qui attendent que justice leur soit rendue, car eux aussi veulent rentrer chez eux pour leurs affaires quotidiennes. Rien que pour cela, la juge, en bonne magistrate près de ses devoirs, rappelle au couple brisé la célérité dans les réponses, qui doit prévaloir dans cette salle d'audiences, afin que chacun saisisse sa chance d' obtenir satisfaction. Et pour mieux aller vite vers un dénouement rapide de cette triste affaire qui prend les deux tiers des rôles des magistrats du siège, la présidente pose alors la fameuse question qui allait enfin permettre aux deux parties de vider leur gibecière de ce qui les encombrait:
«Mais, Ya Allah! Pourquoi en être arrivés là? Vous ne pouviez donc, pas voir avec vos conseils, en vue de régler normalement, cette «épine», en gens civilisés? Nous sommes tout de même en 2024, et fin septembre!»
Éclate presque la magistrate que suivent religieusement les deux conseillers prêts à la secourir à la moindre embûche.