Papa voulait changer de statut!
Abou Larbi. T. quatre-vingt et un ans, poursuivait ses enfants pour menaces, fait prévu et puni par l’article 284 du code pénal. L’atmosphère est électrique. Mais la présidente de l’audience veillait au grain…
Le vieux tribunal avait ouvert ses portes bien avant le début de l'audience hebdomadaire, que présidait la farouche juge du mercredi. Elle n'était pas si farouche que cela, mais «griffait» à la 1ère tentative de troubler l'ordre public en pleine audience.
L'atmosphère est franchement, et ouvertement hostile, mais la juge, elle, qui en avu et entendu d'autres, veillait au grain.
Le papa, victime désigne, en 1er, la fille aînée, de l'index en guise d'avertissement: «Toi, qui te prends pour la cheffe de famille, avant ma mort qui ne sera pas pour demain, «incha Allah», tu as intérêt à ne rien dire, tant que je suis vivant! Car, ne l'oublie surtout pas, je suis le seul responsable de ma famille, et j'entends le rester jusqu'à mon dernier souffle!»
Puis il s'adresse au fils cadet. Confus, la tête basse, muet, le jeune homme ne trouvait aucune couverture afin de s'envelopper dedans, car la honte l'habitait, durement, et le recouvrait entièrement. «Quant à toi, petit voyou, ne t'avise plus de remettre les pieds chez moi. Tu es un homme, non? Va chercher une bicoque où loger ta famille! Cela t'apprendra à te frotter à ton père malade, diminué, écrasé, mais toujours debout, veillant sur sa femme qui ne l'a jamais laissé tomber. Je ne répèterai plus jamais ces mots.»
Mais, la présidente veillait, en grondant le père, d'une façon «diplomatique». Entre-temps, le jeune parquetier fraîchement débarqué du tribunal d'El Djamel (cour d'Oran), feuilletait le code pénal, probablement à la recherche de l'article reprenant «les menaces», l'article 284 du code pénal (ordonnance n°75 -47 du 17 juin 1975) dispose que: «Quiconque menace, par écrit anonyme ou signe image, symbole ou emblème, d'assassinat, d'emprisonnement ou tout autre attentat contre les personnes, serait punissable de la peine de mort ou de la réclusion criminelle, est dans le cas ou la menace est faite avec ordre de déposer une somme d'argent au lieu indiqué, ou de remplir toute autre condition, puni d'un emprisonnement de deux ans à dix ans et d'une amende de cinq (500) à cinq mille (5000) DA.
Le coupable, peut, en outre, être frappé pour un an au moins et cinq ans au plus de l'interdiction d'un ou plusieurs des droits mentionnés à l'article 14 de l'interdiction de séjour.»
Mais ce qui est navrant, triste et frappant dans ce cas d' espèce, c'est le simple fait que les menaces ont été proférées par des enfants, à l'encontre du père.
Le drame, c'est aussi que cette histoire est arrivée à la suite du remariage du patriarche.
On devine aisément que les histoires et autres jacasseries étaient pratiquement quasi quotidiennes.
Le bol et son ras sont venus au mauvais moment: le papa a parlé longtemps, reparlé, menacé, averti, tournoyé la canne sans pour autant l'utiliser. Il faut aussi et surtout préciser que la juge, a su écouter tout le monde et compris ce qu'il fallait faire.
La fille avocate était étranglée par l'émotion et assuré le magistrat, que son père a surtout dit des trucs qui dépassaient ses pensées.
Le fils a aussi pleuré. «Oui, Mme la juge, j'ai longtemps pleuré d'avoir, comme hier, par le fait d'avoir été mis à la porte, par mon propre père, sous le regard hagard de ma pauvre maman, qui avait reçu la veille, tard dans la nuit noire, une mémorable, dégradante et sauvage raclée.» Mais le vieil avocat a affirmé bien connaître la famille, et qu'il saura, avec le temps, si le destin le voulait, réconcilier toute la famille. Ce qui est à signaler, c'est le fait de voir le patriarche parler en même temps que le conseil qui plaidait! Il était seulement, agacé, mais non dérangé. Loin de là!
La juge était tout de même presqu'heureuse que les débats aient pris fin sans accrocs.
Rappelons que le papa - victime de menaces de la part de ses propres gamins, s'est tellement plaint, en faisant les cent pas à la barre, que les présents se sont sentis interpellés. Après que les enfants se soient excusés auprès du paternel, la présidente a décidé d'une courte mise en examen du dossier, un dossier à oublier au plus vite, cette sacrée vie de chien, en ces durs moments que traversent bien des nations, en matière de difficiles liens parents-enfants, pourtant, bien en avance, sur nous, et sur tous les plans!
Les enfants ont écopé d'une peine assortie du sursis. Une manière pour la juge, de tendre haut et menaçant, le glaive de la justice, pour au mois cinq bonnes années.