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Massacre du 17 octobre 1961 : Mohamed Ghafir, dit Moh Clichy, à L’Expression

«Les émigrés ont payé le prix du sang pour l’Algérie»

Témoin et l'un des architectes des manifestations du 17 octobre 1961, Mohamed Ghafir revient dans cet entretien sur les événements qui ont précédé et ceux qui ont succédé au massacre...

L'Expression: Comment vous êtes arrivé à la Fédération du FLN en France?
Mohamed Ghafir: J'ai intégré le FLN en France, dans le quartier de Clichy, en septembre 1955. L'action de la révolution en France était importante. Il fallait sensibiliser les émigrés, organiser la collecte des contributions financières de la diaspora dans un premier temps. Une fois bien structurée la Fédération du FLN en France est passée à l'engagement militant à proprement parler. Parmi les actions que nous menions, il y avait la grève des 8 Jours en janvier 1957. C'était un succès éclatant. Une réussite qui nous avait confortés dans notre combat pour l'indépendance du pays à partir de la métropole. J'ai été arrêté en janvier 1958 pour être libéré en 1961, quelques 10 mois avant les manifestations du 17 octobre. Entre-temps, mes camarades étaient passés à l'action armée le 26 août 1958 avec l'ouverture du second front armé. L'engagement militaire sur le sol du colonisateur a amené les autorités françaises à durcir leur dispositif sécuritaire contre les membres de la Fédération du FLN en France.
De 1958 à 1961, la guerre battait son plein en Algérie et dans la métropole. une partie de ces trois années, vous l'aviez passée en prison, mais les informations vous parvenaient...
En effet, en prison nous étions informés par nos avocats et les nouveaux détenus. À ce propos, il faut savoir que l'administration de Maurice Papon avait décrété un premier couvre-feu qui ne concernait que les Algériens pour contenir les actions de la Fédération du FLN en France. Cette mesure n'avait pas été respectée par les Algériens, notamment par les militants. L'action était difficile, de nombreux camarades, mais aussi des Algériens sans aucune appartenance politique ont été interpellés et emprisonnés pour violation du couvre-feu. J'étais effectivement en prison lors de ce premier couvre-feu. Ce qu'on peut en dire, c'est qu'il n'y avait pas eu de mort dans la répression des Algériens. D'ailleurs, il n'y avait pas eu d'action concertée pour une manifestation populaire pour dénoncer l'acte raciste de la préfecture.

Le deuxième couvre-feu à partir de 20 heures, jusqu'à 5 heures du matin. a été imposé aux Algériens par le préfet Papon, à partir du 5 octobre 1961. comment s'est organisée la riposte au sein de la Fédération du FLN en France?
D'abord, nous avons été informés de la date du début du couvre-feu par voie de communiqué. Le ton était plus ferme et la plage horaire annoncée par la préfecture avait pour objectif d'étouffer les activités des militants. D'entrée, on sentait clairement que la préfecture de Paris avait la ferme intention de faire respecter strictement la mesure de Papon. Il devenait, dès le 5 octobre, impossible de circuler en métropole. Les arrestations étaient systématiques et bien plus nombreuses que lors du premier couvre-feu en 1958. Les réunions devenaient très difficiles à organiser. Beaucoup de militants voulaient briser cette interdiction de circuler. Au niveau de la direction de la 7e wilaya, nous ne voulions pas improviser. Nous avons transmis des rapports au Gouvernement provisoire les informant de la situation. Nous avons reçu la directive en date du 12 octobre. Selon le document, l'action devait être populaire et divisée en trois phases. La première devait débuter le 17 octobre avec appel aux Algériens d'investir les grands boulevards de la capitale française à partir de 20 heures. La deuxième phase devait débuter le lendemain, c'est- à- dire, le 18 octobre, à travers une grève générale dans toute la France. La troisième phase du plan du GPRA consistait en une manifestation de toutes les femmes algériennes devant les commissariats et les casernes de la gendarmerie.

Sur le plan organisationnel, comment a été gérée cette manifestation par la Fédération du FLN en France?
Des instructions fermes ont été données pour éviter tout acte violent. Les armes, les couteaux et même les bâtons ont été proscrits par l'organisation. Les manifestants ne devaient en aucun cas répondre aux provocations. Nous nous attendions à des arrestations massives. Aussi, les cadres de la Fédération ont été tenus à l'écart pour éviter tout affaiblissement de l'organisation. L'objectif était de faire une démonstration de force pacifique de la détermination des Algériens. On tentait de renouveler la grève des 8 Jours de 1957. On était très loin de penser que les policiers allaient faire montre d'une sauvagerie, aujourd'hui encore, innommable.

Comment avez-vous vécu l'après - 17 octobre 1961?
Le couvre-feu a été levé le 19 octobre, mais les policiers sévissaient toujours contre les Algériens plusieurs jours après. La terreur n'était donc pas retombée. Mais je retiens que tous les martyrs du 17 octobre 1961 ont contribué à hâter l'indépendance du pays. Et pour cause, le 28 du même mois, le président De Gaulle avait appelé à la reprise des négociations. Moins de 5 mois plus tard, le 19 mars 1962, le cessez-le-feu a été signé entre la France et le GPRA.

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