L'après-présidentielle américaine
Entre le calme et le chaos
La journée cruciale du 6 janvier 2025, durant laquelle sera certifié le scrutin, bénéficiera du même niveau de sécurité que la cérémonie d'investiture du futur Président. Les centaines de condamnations sévères infligées aux émeutiers du 6 janvier auront un certain effet dissuasif.

La présidentielle américaine 2024 est remarquable en ce qu’elle génère autant de suspense sur le résultat du scrutin que sur l’après-scrutin : verra-t-on une grande bataille judiciaire, une contestation violente s’exprimer dans les rues ou, au contraire, un pays refusant de se déchirer davantage ? La réponse à ces questions dépendra grandement de la capacité des candidats à accepter leur éventuelle défaite, au terme d’une course probablement remportée sur le fil. Or, de ce point de vue, c’est surtout Donald Trump qui inquiète. Le républicain de 78 ans ne cesse d’affirmer que la seule possibilité pour lui de perdre serait que le camp de son adversaire, Kamala Harris, truque les résultats de l’élection du 5 novembre. Et il affirme toujours que la présidentielle de 2020 lui a été volée, élément central des poursuites fédérales qui le visent pour sa tentative présumée d’inverser le résultat de ce scrutin. «S’il perd, je suis certain qu’il va crier à la triche, faire tout ce qui est possible pour inverser les résultats et qu’il refusera d’assister à l’investiture de Harris. Non seulement c’est un mauvais perdant, mais jamais il n’admettra une défaite», prédit Donald Nieman, professeur de sciences politiques à l’Université Binghamton dans l’État de New York.
De son côté, Kamala Harris, si elle perd, acceptera-t-elle de reconnaître son échec ? Ses partisans le pensent à 95%. Deux Américains sur trois redoutent une éruption de violence dans le sillage du 5 novembre, selon un sondage d’Ipsos dévoilé jeudi dernier. Les deux candidats s’accusent mutuellement d’attiser les tensions. Kamala Harris reproche désormais à Donald Trump d’être un «fasciste». Le milliardaire a, lui, directement imputé les tentatives d’assassinat qui l’ont visé à la rhétorique de son adversaire démocrate, responsable, selon lui, d’un «bain de sang» aux États-Unis. À Washington, les autorités se préparent depuis au moins un an à la période extrêmement sensible qui ira du jour de l’élection au 20 janvier 2025, date de l’investiture. Déjà, de premières barrières métalliques se dressent près de la Maison-Blanche. D’autres entoureront bientôt la zone du Congrès. Et la police du Capitole, où siège le Congrès, voit ses effectifs gonfler à 2 100 agents. La journée cruciale du 6 janvier 2025, durant laquelle sera certifié le scrutin, bénéficiera du même niveau de sécurité que la cérémonie d’investiture du futur Président. Il y a quatre ans, l’élection s’était tenue le 3 novembre mais le résultat n’avait été connu que le 7. Donald Trump s’était déclaré vainqueur dès la nuit du vote et avait immédiatement commencé à dénoncer des irrégularités supposées, tentant de rallier à sa cause, en vain, son vice-président, Mike Pence, et son ministre de la Justice, Bill Barr. Si le candidat républicain devait à nouveau crier victoire de façon prématurée, nous «avons les ressources et l’expertise» pour réagir, a affirmé Kamala Harris. En 2020, Trump avait saisi les tribunaux tous azimuts, sans obtenir un seul jugement en sa faveur. Mais les républicains ont tiré les leçons de cette bérézina judiciaire. Ils ont recruté une armée de 100 000 bénévoles et de milliers de juristes chargés de veiller à «l’intégrité» du scrutin.