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Vers un nouveau système politique en Tunisie?

Le président Saïed prend «des mesures exceptionnelles»

Dorénavant, le président légifèrera à travers des décrets-lois, sans vote du Parlement dont les activités sont suspendues depuis que M. Saïed s'est octroyé les pleins pouvoirs le 25 juillet et présidera les réunions du Conseil des ministres.

Les «mesures exceptionnelles» décrétées par le président tunisien Kaïs Saïed pour renforcer ses pouvoirs au détriment du gouvernement et du Parlement dessinent les contours d'un nouveau système politique qui suscite l'inquiétude de ses opposants et de la société civile. Dorénavant, le président légifèrera à travers des décrets-lois, sans vote du Parlement dont les activités sont suspendues depuis que M. Saïed s'est octroyé les pleins pouvoirs le 25 juillet et présidera les réunions du Conseil des ministres. Pour le constitutionnaliste tunisien, Chafik Sarsar, on ne peut pas parler de «dissolution du Parlement».
Le président a décidé de «rompre avec la Constitution de 2014», qui avait instauré un régime hybride plutôt parlementaire, explique-t-il. Pour ce professeur, le président a mis en place «une organisation temporaire des pouvoirs pour préparer la transition vers un autre système constitutionnel». Selon M. Sarsar, M. Saïed a instauré une sorte de «nouvelle mini-Constitution».
L'objectif de ses décrets est de supprimer les «déséquilibres de la Constitution de 2014» qui penchait trop en faveur du Parlement, estime l'analyste politique Salah al-Din al-Jourshi.
Le scrutin législatif de novembre 2019 avait abouti à un Parlement émietté qui avait permis au parti d'inspiration islamiste Ennahdha, bête noire de M. Saïed, d'y assumer un rôle pivot.
M. Jourshi a mis en garde contre une possible dérive vers un «régime présidentiel excessif», avec le risque que le président «ne devienne le centre du pouvoir autour duquel tourne l'Etat».
Le politologue français, Vincent Geisser, chercheur à l'institut IREMAM, spécialisé sur le Monde arabe, va plus loin en estimant que «ce décret officialise le tournant présidentialiste, de pouvoir personnel et autoritaire dans lequel la Tunisie est engagée depuis le 25 juillet».
Pour ce chercheur, ces mesures débouchent sur «une marginalisation du Parlement et des partis politiques, avec un pouvoir exécutif centré quasiment exclusivement sur le président et un gouvernement qui n'est qu'un chef d'administration au service du président».
A ses yeux, le président Saïed a «tourné la page de la première phase de démocratisation de la Tunisie». Officiellement, il s'agit de «mesures exceptionnelles» ayant entraîné la suspension de facto de deux chapitres de la Constitution régulant les pouvoirs exécutif et législatif.
Le décret présidentiel annonce aussi l'instauration d'une commission -dont le président décidera la composition- qui assistera le président dans «la préparation des projets d'amendements relatifs aux réformes politiques». M. Saied a laissé entendre qu'il souhaitait amender la Constitution de 2014. «On n'est pas dans une simple gestion provisoire pour remettre de l'ordre dans le pays», estime M. Geisser qui voit plutôt dans les décrets de mercredi, «les jalons d'un nouvel ordre politique, la base de nouvelles institutions». «Dans ce décret, on perçoit le programme politique de Saïed, un nouveau régime politique centré sur le président». M. Jourshi en convient.
«Une part importante du projet commence à se cristalliser de plus en plus», précisant d'«un système présidentiel», dit-il. Ennahdha, par la voix d'un de ses dirigeants, Samir Dilou, a déploré une «transition d'un pouvoir démocratique vers le pouvoir d'un seul homme», tandis qu'un autre responsable Mohammad Al-Goumani, a accusé M. Saïed d'«entraîner la Tunisie vers une zone à hauts risques».
Pour le moment, Kaïs Saïed «bénéficie d'un capital confiance très fort dans la société civile», estime M. Geisser. Il y a «une division entre ceux qui croient voir en lui l'homme fort qui va sauver la Tunisie et les autres». «Ce président a des relais dans les élites, il a l'appui des forces sécuritaires, c'est un président très fort», souligne-t-il.
Depuis la révolution de 2011 qui a renversé le régime Ben Ali, la parole s'est libérée en Tunisie, dans tous les milieux: ONG, syndicats, milieux politiques, société civile. Mais selon M. Geisser, il n'y a «pas de front démocratique uni, les acteurs de la société civile sont divisés et un phénomène de peur a commencé à s'installer».

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