Le XXIe siècle sera celui du continent noir
L'Afrique est un géant en devenir
Les Brics compteront bientôt en leur sein des géants régionaux africains. Car quoi qu'on dise, la nouvelle usine de la planète sera l'Afrique.

Le XXIe siècle sera-t-il africain? Beaucoup d'observateurs n'en doutent pas, même si l'actualité du moment ne semble pas l'indiquer. Le bras de fer entre l'Occident et l'Asie, sur fond de développement de l'Intelligence artificielle, relègue le continent noir aux deuxième sous-sol des préoccupations des deux plus importants pôles de puissance. Le terrain de l'affrontement est, certes, technologique et l'on sent à terme une énième révolution humaine, censée propulser l'humanité au 3.0 de son évolution. Mais la bataille est également bassement humaine, comme au bon vieux temps. La guerre en Ukraine est l'expression immédiate du conflit entre une Alliance atlantique sur le déclin et une Asie en cours de formation pour se tailler la part du lion dans le PIB mondial. La dédollarisation, visiblement en marche depuis quelques années déjà, apporte la première pierre à l'édifice du nouvel ordre mondial où l'Occident devra composer avec plusieurs autres puissances montantes. À voir l'échiquier géopolitique qui préfigure à l'émergence de cette humanité 3.0, on ne distingue pas clairement la place d'un continent, dont les indices de développement humain sont comparables à ceux du début du XXe siècle occidental. Pollué par des guerres, par-ci, des coups d'État, par-là, l'Afrique peine à dépasser les 50% du taux d'électrification, lutte toujours contre des maladies moyenâgeuses et parvient difficilement à scolariser tous ses enfants. Cette image que vendent les médias occidentaux n'est pas totalement fausse. Le continent est loin de l'excellence en matière de développement. Mais l'Afrique, c'est aussi des niveaux de croissance bien plus élevés de ce qui se fait ailleurs dans le monde. Même s'il fallait relativiser la dynamique économique que connaît cette partie de la planète, elle n'en est pas moins réelle et fait saliver beaucoup de capitaines d'industrie. L'Afrique est le seul continent qui dispose d'un accroissement démographique vigoureux. L'âge moyen de ses habitants oscille entre 20 et 30 ans, selon les pays. Son sous-sol regorge de tous les ingrédients nécessaires à la révolution technologique à venir. L'ensemble des minerais rares entrant dans la production de matériel de haute technologie est éparpillé dans les territoires du continent. L'Afrique est aussi très bien placée pour desservir toute la planète en énergie renouvelable. Elle ne manque pas de soleil. Elle peut aussi se targuer d'être on ne peut plus riche en énergie intermédiaire, le gaz, et dispose d'un réservoir non négligeable d'énergie du désormais ancien monde, le pétrole. Ce sont autant d'atouts qui font dire aux observateurs que l'Occident et l'Asie ne feront pas l'avenir à eux seuls. Le continent noir est incontournable dans le processus de façonnage du nouveau monde. L'on pourrait penser que l'Histoire bégaye, que l'humanité se retrouve dans la même posture qu' à l'aube de la révolution industrielle, annonciatrice de la vague de colonisation prédatrice de l'Afrique. La comparaison n'a pas lieu d'être. Le continent est connecté au monde. Il dispose d'un véritable axe de développement Alger-Abuja-Johannesburg. D'immenses projets intégrateurs sont en voie de réalisation. De plus, l'Occident n'est plus seul. La Chine, la Russie, la Turquie lorgnent l'Afrique. Des infrastructures de base voient le jour un peu partout. Les États du continent connaissent désormais mieux leur intérêt. La Zone africaine de libre- échange (Zlecaf) construit l'avenir commercial intra-africain. Celui-ci est minime, mais les Africains y travaillent. La réunion du Kenya a été précédée par tant d'autres conférences. La superstructure est en passe d'être montée. Les Brics compteront bientôt en leur sein des géants régionaux africains, à l'image de l'Algérie, le Nigeria et l'Égypte. Cela devrait suffire pour convaincre les partenaires asiatiques et occidentaux à commercer d'égal à égal, à transférer leur savoir-faire. Car quoi qu'on dise, la nouvelle usine de la planète sera l'Afrique. Il n'est pas dit que cet objectif soit atteint en une ou deux générations, mais l'on peut être certain sur le fait que le processus est lancé et qu'avant l'avènement du XXIIe siècle, l'Afrique aura son mot à dire et travaillera à faire bourgeonner l'humanité 4.0.