Draâ El Mizan
Racontez-nous LA bataille des Grottes
La bataille du 6 janvier 1959 a mis en échec les sections des grottes.
L'historien et archiviste Christophe Lafaye, également membre de l'Association Josette et Maurice-Audin et la journaliste Claire Billet, avec son enquête parue dans la revue XXI en 2022 ont révélé au monde un autre crime de l'armée française commis pendant la guerre d'Algérie, exactement dans les Aurès et la Kabylie. L'armée française avait bel et bien fait usage d'armes chimiques dans les maquis de Kabylie et des Aurès. La bataille du 6 janvier 1959 à Izra-Aissa dans la daïra de Draâ El Mizan où sont mobilisées des sections des grottes en est un exemple de l'inefficacité de ces armes chimiques face à un peuple décidé de reconquérir sa liberté.
Christophe Lafaye explique que la décision de créer des sections spéciales, dites sections des grottes, pour traquer les combattants du FLN retranchés dans les excavations en montagnes a été prise, le 1 er décembre 1956, dans le secret le plus total, au plus haut sommet de l'État français. Mais, c'est à partir de 1959 que ces sections des grottes se multiplient sous le commandement du général Massu. En tout, 95 opérations de gazéification ont été effectuées durant la période allant de 1959 à 1961. Ces gazéifications ont fait 200 morts parmi les combattants de l'ALN.
Pour effectuer les opérations d'expérimentation, une unité spécialisée des Batterie des armes spéciales (BAS), du 411 e régiment d'artillerie antiaérienne est créée, ajoute l'enquête où il est expliqué qu'avant d'aller sur le terrain, les soldats recevaient des formations à Bourges, au 610e groupe d'expérimentation et d'instruction des armes spéciales (GEIAS) pour manier ces armes formées de grenades, chandelles et roquettes chargées de gaz toxiques.
Les 18 sections spécialistes des grottes ont commis des crimes contre l'humanité, mais elles n'ont pas apporté la victoire à l'armée française. Bien au contraire, la bataille du 6 janvier 1959 à Aït Yahia Moussa dans la daïra de Draâ El Mizan a prouvé que ces armes chimiques ne sont pas efficaces devant des hommes décidés à vaincre ou mourir. C'était une bataille asymétrique à tout point de vue. Les forces et les moyens utilisés par l'armée française dont la section des grottes étaient largement supérieurs à ceux de l'ALN.
Mais, les 6ème et le 9ème et le 159ème régiments de l'infanterie de marine, le 7ème régiment de hussards, le 22ème bataillon de chasseurs alpins, le 4ème régiment d'artillerie, un bataillon du 20e GAP et le 93ème régiment d'artillerie de montagne n'ont pas pu avoir raison des quelques compagnies dirigées par Krim Belkacem, commandant Azzedine et le colonel Amirouche qui comptaient sur le terrain sur des hommes de grande valeur comme Si Moh Ouamar Mahmoudi, Si Mouh Ouhemou, Si Belaïd et Slimane Tadjer.
‘À l'issue de cette bataille qui dura deux longues journées pendant lesquelles toutes les armes sont utilisées, notamment celles de l'armée de l'air et de la section des grottes, l'ALN a perdu 385 combattants et l'armée coloniale armée jusqu'aux dents 35 soldats. Mais, cette supériorité numérique et en moyens ainsi que ces sections des grottes et les armes chimiques dont elles font usage n'ont pas garanti la victoire. Bien au contraire. Outre l'impact de cette résistance héroïque sur le plan moral de ses troupes, la France coloniale aura mis sur son dos un autre crime contre l'humanité qui vient s'ajouter au registre des enfumades. Des crimes qu'il faudra, un jour ou l'autre, reconnaître.