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Convoqué, hier, par le tribunal de Sidi M’hamed

Saïd Bouteflika refuse de répondre aux questions du juge


Coup de théâtre au tribunal de Sidi M’hamed. Au troisième jour du procès des ex-hauts responsables et hommes d’affaires, un témoin de marque était, hier, à la barre : Saïd Bouteflika. Convoqué comme témoin par le juge, l’ex-conseiller du président déchu a refusé de répondre, se contentant d’esquisser des sourires à chaque question. Qui aurait imaginé un jour voir Saïd Bouteflika, frère de l’ex- chef d’Etat devant le juge ? Amaigri, il était pourtant bien là, hier. Cité par Ali Haddad, l’ex-patron du FCE, comme étant l’ordonnateur pour le financement occulte du 5ème mandat, le procureur a demandé sa présentation comme témoin pour éclairer la justice. Jamais les procédures n’ont été aussi diligentes. A peine la requête formulée par le ministère public qu’elle est acceptée par le juge qui annonce la levée de la séance jusqu’à l’arrivée du témoin. Ce dernier a été ramené de la prison de Blida où il y séjourne depuis six mois après sa condamnation par le tribunal militaire à 15 ans de prison pour « atteinte à l’autorité de l’armée » et « complot contre l’autorité de l’État ». 17h30, Saïd Bouteflika fait son entrée dans la salle où tous les regards le cherchent. Il n’y restera, cependant, pas longtemps. Juste le temps de décliner son identité en réponse à la question du juge. Il refusera, ensuite, de répondre aux questions. Le juge ordonne son évacuation et relance le procès.
Dans la matinée et dès l’ouverture de la séance, Ali Haddad a été appelé à la barre. Ce dernier n’est pas seul. A ses côtés sont également appelés Hadj Saïd Malek, son directeur de cabinet et Chaïb Hammouche, le financier de la direction de la campagne de l’ancien président Bouteflika. Mine défaite, teint morne, Ali Haddad est le premier à prendre la parole. Il va se lâcher face au juge, mais ce n’était pas sans conséquences puisque l’accusé s’est contredit plusieurs fois, perdant beaucoup de sa crédibilité. En effet, Ali Haddad qui a insisté sur le fait qu’il n’avait aucun poste dans la direction de campagne de l’ex-président et qu’il n’a jamais été chargé de collecter les fonds, va se mêler les pinceaux en parlant de Said Bouteflika et des milliards collectés. Il explique que Saïd Bouteflika l’a contacté par téléphone, janvier dernier, pour lui demander son aide pour préparer le 5ème mandat. Plus loin, il va déclarer l’avoir rencontré. En tout, Saïd Bouteflika a contacté trois fois Haddad. La première fois, en janvier, pour lui demander son aide et lui annoncer les personnes désignées pour mener la campagne, à savoir Sellal, Amara Benyounès, Yahyaoui Moundeir et Chaïb Hammouche, une seconde fois, un mois après, pour lui annoncer que la campagne allait commencer et une dernière fois, le 6 mars, pour lui demander de transférer les sommes collectées du siège de la campagne vers un autre «lieu par mesure de sécurité». Et d’affirmer «Saïd m’a dit qu’on parle de 700 à 800 milliards de centimes au niveau du siège et qu’il faut les transférer vers un lieu sûr». Haddad affirme ignorer l’origine de cette somme colossale et ne donnera pas plus de détails étant interrompu par le juge qui appelle Chaïb. Ce vieux de 89 ans a bonne mémoire. Il confirme au juge que l’argent collecté, d’un montant de 75 milliards de centimes, a été placé dans deux comptes. Celui de Sellal, directeur de campagne, dans un premier temps, ensuite Zalène qui l’a remplacé à ce poste. Il affirme que Haddad lui a demandé de retirer la somme et que trois retraits ont été effectués : «Nous avons retiré 12, 5 et enfin 2,5 milliards et c’est Hadj Saïd qui a pris l’argent.» Hadj Saïd est interpellé alors «c’est sur la demande de Haddad et j’ai pris ces sommes pour les mettre dans une armoire dans le bureau de Haddad, au siège de l’Etrhb de Dar El Beida». Et c’est là que Haddad va commettre la première bourde «Je ne savais pas que le premier retrait était de 12 milliards, je croyais que c’était 100 milliards.» Haddad parle de centaines de milliards et d’ailleurs, il n’a pas expliqué la destination des 700 ou 800 milliards de centimes qu’il a cités plus haut. Cette confusion entre les centaines de milliards et les 75 milliards retrouvés dans les comptes va rester intacte. Car, le juge va se limiter à essayer de comprendre où sont passés les 75 milliards dont la trace a été retrouvée.
Or, Haddad a parlé de centaines de milliards qui se trouvaient au siège de la campagne, autrement dit, hors circuit bancaire ! Haddad va expliquer que sur les 19,5 milliards retirés, 6,5 milliards ont été déboursés pour la location des trois sièges de la campagne et le mobilier, 400 millions pour payer une facture. Si les 12,6 milliards sont toujours dans l’armoire de Haddad, la destination du reste des 75 milliards n’est pas connue. Encore moins, celle de l’argent du siège ! Ali Haddad va revenir sur le chèque de 39 milliards que lui a remis l’accusé Mazouz, soutenant qu’il ne s’agit que d’un concours de circonstances et que Mazouz avait appelé, ce jour-là, Baïri, le patron d’Ival, également prévenu, qui se trouvait en sa compagnie au siège du FCE et c’est ainsi qu’ils ont pris un café à trois et que Mazouz a demandé à ses amis de transmettre sa contribution pour soutenir le 5ème mandat à la direction de campagne. En interrogeant Haddad, le procureur va révéler plus tard qu’en contrepartie de sa contribution, Mazouz espérait la levée des contraintes pour son usine de sucre, sise à Larbatache. Haddad insiste «je n’étais pas au courant pour son usine et je n’ai jamais demandé à Mazouz ou un autre de verser de l’argent». Baïri a, lui aussi, donné une vingtaine de véhicules et 20 milliards de centimes pour la campagne à Ali Haddad. Mais ce dernier va dire que les véhicules étaient un achat groupé décidé par son Groupe Média Temps.
Ce que Baïri rappelé à la barre, va confirmer, contredisant ses premières déclarations transcrites dans les procès-verbaux, comme lui fera remarquer le procureur. Haddad est appelé à se justifier également sur la désignation de Hammouche Chaïb comme financier de la campagne. Il nie face à Chaïb qui ne trouve rien d’autre à dire alors pour rectifier le tir que «Haddad m’a appelé pour ce poste, mais c’est sur demande de Saïd Bouteflika».
Le juge va appeler, ensuite, à la barre, les personnes morales accusées dans cette affaire. Il s’agit des entreprises détenues par les hommes d’affaires et qui ont servi de moyen pour le blanchiment d’argent et le financement occulte de la campagne électorale, comme va essayer de le démontrer le procureur. Le représentant du ministère public et à travers ses questions, va établir que la majorité de ces entreprises n’était constituée que de sociétés écran à l’exemple d’une société pharmaceutique qui n’a effectué aucune opération depuis sa création jusqu’à sa dissolution, trois ans après.
Vient le tour de l’audition des parties civiles. Le passage des victimes à la barre pour témoigner de la politique de «copinage» pratiquée par les ex-dirigeants dans le traitement des dossiers de montage de l’automobile, va donner le coup de grâce à tous les accusés. Le premier à comparaître est l’homme d’affaires Abderrahmane Achaïbou qui a perdu la marque KIA, accordée à Larbaoui. Ce dernier apporte les documents avant d’affirmer que l’ex-ministre de l’Industrie l’a écarté et a redistribué les cartes. Selon ce témoin, Bouchouareb distribuait à son gré les marques sans se référer ni à un dossier ni à une commission. D’ailleurs, l’ex-directeur de la commission technique, accusé également, a affirmé que tous les dossiers passaient par le bureau du ministre avant d’arriver à la commission et que le dossier Achaïbou n’y était jamais parvenu. «Je suis le doyen des concessionnaires automobiles avec sept marques. Bouchouareb m’a enlevé six marques et a dit que je devais m’estimer heureux», va lâcher Achaïbou affirmant avoir déposé un dossier complet pour le montage, mais qu’il a été écarté. Il a adressé 22 correspondances à Bouchouareb, des recours à Ouyahia et Sellal. Il a écrit aussi à Mahdjoub Bedda, mais aucune suite n’a été donnée bien que ce dernier ait accepté de le recevoir. «Je suis heureux d’être là aujourd’hui. Cela fait 4 ans que je ne dors plus et j’ai dû licencier quelque 1100 employés», a déclaré la victime. Avec 42 ans d’expérience dans le domaine automobile, Achaïbou affirme que si les voitures coûtent plus cher aujourd’hui, «c’est l’œuvre de Bouchouareb. C’est à cause du cahier des charges» et d’ajouter «le SKD et le CKD ne seront jamais rentables pour l’Algérie». Emin Auto est une autre victime des ex-hauts cadres. Son propriétaire, un Turc, a lancé un appel à la justice affirmant qu’il est au bord de la faillite et que tous ses biens vont être saisis d’ici la fin de l’année. Cette victime a investi quelque 70 millions de dollars pour la construction d’une usine à Aïn Témouchent pour le montage de la marque chinoise JAC «mon dossier répondait à tous les critères et tous les responsables m’ont encouragé pour lancer le projet. Sellal et Ouyahia ainsi que le directeur de la commission technique, tous m’ont encouragé avant de bloquer mon dossier».
Omar Rebrab sera la dernière victime entendue, hier. Le fils du patron de Cevital, a tout d’abord expliqué comment les autorités algériennes avaient saboté ses partenariats fructueux avec des investisseurs étrangers; notamment les Coréens. « Je suis entré dans le monde de l’automobile en 1997. Nos investissements étaient gelés dans tous les secteurs. Nous voulions investir dans le montage automobile; mais les Coréens m’ont fait savoir que mon affaire était politique», a-t-il affirmé. Rebrab poursuit en dévoilant les avantages accordés par le gouvernement de l’époque à certains hommes d’affaires connus pour leurs accointances avec le système Bouteflika. «Nous étions surpris que toutes les marques que je représentais aient été accordées au final à Larbaoui et à Tahkout», a-t-il ajouté. Durant son audition, Omar Rebrab va enfoncer l’ex-ministre de l’Industrie en fuite, Abdessalem Bouchouareb en affirmant que le patron du groupe Sovac, incarcéré à El Harrach, Mourad Oulmi, «a acheté une villa située à Hydra à Bouchouareb et lui a donné une voiture; en échange Bouchouareb lui a offert l’autorisation de montage des voitures Volkswagen». Après le passage surprise de Saïd Bouteflika au tribunal de Sidi M’hamed, en sa qualité de témoin et son refus de répondre aux questions, le juge a ouvert le bal aux plaidoiries de la partie civile. Le réquisitoire du procureur sera connu aujourd’hui. 

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