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Décès du célèbre photographe des femmes algériennes sous la colonisation

Marc Garanger n’est plus

«Il n’y avait aucune violence de ma part, mais c’était la situation qui était violente», avait reconnu le photographe lors de sa présence à Alger au festival du film engagé en 2018.

Le photographe français Marc Garanger, connu pour ses célèbres photographies controversées représentant en outre des femmes algériennes en 1960 sous le régime colonial, est décédé mercredi dernier à l'âge de 85 ans. En effet le photographe qui a toujours affirmé avoir soutenu à sa manière le peuple algérien sous le joug colonial en mettant ces personnes en lumière n'a toujours pas fait l'unanimité chez certaines personnes dont d'aucuns lui reprocheraient jusqu'à nos jours sa façon toute aussi radicale à avoir dévêtu le visage de ces femmes et les avoir obligées à poser devant son appareil photo. Une forme de violence en somme qui n'a pas été du goût de beaucoup d'Algériens. Marc Garanger qui avait immortalisé des portraits de femmes réalisés sur les Hauts-Plateaux de Kabylie en 1960 aurait reconnu plus tard: «Elles m'ont foudroyé du regard» ce qui a accentué peut-être cette interprétation qu'ont certaines personnes jusqu'à aujourd'hui à propos du présumé mauvais traitement accordé envers ces femmes, ce que le photographe aurait récusé depuis toujours. Invité d'ailleurs, à la 8ème édition du Festival international du cinéma d'Alger (Fica), dédié au film engagé, Marc Garanger était venu accompagner un film documentaire qui lui était dédié et signé par la réalisatrice Naïs Van Laer.
La force du regard
En aparté, elle nous confiait après nos félicitations pour la beauté de son doc: «Je me devais d'être à la hauteur de ce grand photographe.». Formée à l'école des beaux-arts, cette documentariste avait réussi le pari de parler de guerre avec douceur, voire même de pudeur mêlée à un aspect fortement esthétique. Et d'estimer lors du débat qui a suivi la projection de son film «Vivre avec son oeil»: ««La force qu'il y a dans ces photos selon mon point de vue est que je vois deux personnes qui sont prises au piège dans une même guerre et qui s'en sortent toutes les deux par le regard. Marc parle à travers son objectif en cadrant en majesté, à la ceinture avec des références photographiques très précises, ces femmes qui ramènent à l'histoire de la colonisation américaine sur le peuple amérindien d'Amérique du Nord et il témoigne de la violence de la situation grâce à ses photos. Il savait qu'il témoignait de ça car c'était clair depuis le début qu'il partirait avec ses négatifs au service de l'indépendance de l'Algérie. Et les femmes effectivement, qui étaient forcées à enlever le chèche et leur voile, s'en sortaient aussi par le regard puisqu' elles fusillent du regard le photographe qui les oblige à être capturées photographiquement. Quand j'ai fait ce film j'étais très consciente de ça et je voulais vraiment que ça existe, la question du viol symbolique. Pourtant, je pense que c'était une situation violente des deux côtés et que chacun s'en est sorti par son regard et en cela c'est un témoignage très important sur cette situation.». Et de poursuivre: «Ce qui m'a amené à faire le portrait de Marc Garanger parce qu'on partage un peu ça et l'amour que je porte à l'image. J'aime beaucoup faire confiance à l'image, ça raconte quelque chose sans forcément avoir une légende ou de voix off. C'est peut-être pour cela que j'ai laissé une grande place au silence. J'ai voulu aussi structurer le film comme ça autour d'une prise de conscience politique anticolonialiste quand Marc avait une vingtaine d'années en Algérie et une forme de prise de conscience plus philosophique quand Marc avait 40-50 ans auprès des peuples nomades de Sibérie. C'était aussi proposer une réflexion plus globale sur: qu'est-ce que la colonisation?»
«Viol symbolique»
Présent à la projection et bien attentif aux questions du public l'on se souvient très bien, Marc Garanger avait tout de même reconnu ce «viol symbolique», le fait de photographier des femmes forcées à se dévoiler pour des photos d'identité. Tempérant néanmoins ses propos, il ajoutera: «Il n'y avait aucune violence de ma part, mais c'était la situation qui était violente», s'est défendu le photographe qui s'est dit être pris au piège de l'armée française qui n'a jamais réclamé, a-t-il poursuivi, les «négatifs» des portraits de femmes qu'il a photographiées. Egalement cinéaste, Marc Garanger qui répondait à une question d'un journaliste, avait indiqué que ses «images témoignent de crimes commis par l'armée coloniale en Algérie».
L'oeil et l'intention
Pour rappel, né à Lyon en 1935, Marc Garanger était passionné par la photographie dans les années 1950. Il a rejoint l`armée française pour accomplir son service militaire et fut chargé de photographier près de 2000 femmes algériennes, en majorité rurales, dans la wilaya de Bouira (Aïn Terzine et El Mardoud notamment) dont les populations avaient été transférées dans les camps de concentration. L`administration coloniale, se proposait de recenser les populations des villages dans le but de mieux les maîtriser et de resserrer l`étau autour des éléments de l`Armée de libération nationale (ALN). Les photographies avaient été publiées pour la première fois dans une revue suisse et avaient été considérées comme un témoignage de la barbarie coloniale française avec son corollaire, le racisme. Elles ont été ensuite exposées dans plusieurs villes françaises, en Grèce et en Finlande. Marc Garanger a reçu plusieurs distinctions internationales dont le prix français Niepce de photographie (1966), le prix du New York photo festival (2010) pour ses photographies sur des peuples et communautés dans différentes parties du monde.

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