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Algérie-France

Du bourreau à la victime...

«Les mémoires de la guerre d'Algérie étaient la matrice d'une grande partie de nos traumatismes.» Emmanuel Macron.

Par Yahia Boubekeur

En lisant ces propos rapportés par les médias, je n'ai pu m'empêcher de penser au rapport qui lie le bourreau à sa victime. En effet, depuis son investiture, le président français fait montre d'une constance irréprochable quant à sa volonté de traiter le dossier algérien par un procédé pernicieux,celui de faire du bourreau, la victime.
Déjà, lors de sa visite furtive, à Alger en 2017, il n'avait pas manqué de proclamer son «refus d'être otage du passé» pour accuser «ceux qui lui font du chantage depuis 60 ans», afin de désigner un autre coupable dans l'histoire. Et par voie de conséquence, se présenter en victime, en sachant bien ce que représente la victime dans les esprits. La crise, entre Alger et Paris, est une fin de crise victimaire, qui met un terme à la confusion de langage et à la mise en accusation de l'Algérie «qui ne veut pas tourner la page de l'histoire», qui la transforme subtilement en coupable digne de l'homme de 1984 de George Orwell qui proclame que «la victime c'est la coupable».
En évoquant «nos traumatismes» devant cette jeunesse «paradoxale» franco-algérienne lors de ce déjeuner à l'Elysée, le 30 septembre dernier; «pour parler librement», le président français rejoint F. Gautier qui écrira en 1845, après le massacre de la tribu des Ouleds Riahs: «Dans ces horreurs orientales, les victimes ont une part de responsabilité; c'est leur propre férocité qui est contagieuse, une sorte de typhus moral, contre lequel le vainqueur ne se protège pas». Et en application du théorème qu'il n'y a pas de bourreau sans victime; le président français entreprend de dénier à la victime l'existence même. C'est dans ce cadre qu'il faut placer son propos, que l'Algérie n'existait pas par elle-même, avant la colonisation. Cette suppression «symbolique» de l'identité d'un pays souverain, libère l'imaginaire colonial de son histoire comme un bagnard se libère de ses chaînes. C'est en ce sens que le déchaînement de l'Algérie, en tant que victime est de nature à l'éloigner de l'emprise de son bourreau, d'une façon thérapeutique salvatrice.
Lors de cette rencontre «libéra-toire», le président français semble confiant, l'air de quelqu'un qui n'a rien dit, ou qui n'a pas dit assez. Pourtant, nous avons une histoire commune. Une histoire sanglante. C'est vous-même qui l'aviez rédigée. Nous nous y référons d'ailleurs, pour écrire la nôtre. C'est-à-dire la mienne que je vais extraire à vos sarcasmes et garder les faits que vous ne pourrez ni modifier ni contourner, afin de nous départir à jamais de ce statut de victime.
Que l'on soit à El Harrach le 7 avril 1832, sur les monts de Dahra le 18 juin 1845, ou à Zaâtcha le 26 novembre 1849, à Laghouat le 4 décembre 1852, en Kabylie en 1871 ou à Boussaâda le
28 mars 1958, nous nous retrouvons toujours face à cette funeste harmonie qui rattache chaque lieu à un carnage.
Chaque oued, chaque mont, et chaque route porte en elle les cicatrices d'une embuscade meurtrière, d'une bataille perdue, et d'un crime organisé.
L'Algérie est un pays vaste que les luttes séculaires avaient cimenté dans la soif et la rage. Un pays que les épreuves avaient rapproché si fortement qu'on ne peut faire un pas, sans blesser une mémoire. C'est pour cela que je vous invite à faire le voyage dans le sens inverse de l'histoire, et sillonner le pays afin d'extirper les larmes et le sang versé pour tenir le coup et vivre debout.
Au départ comme à l'arrivée, le temps et l'espace se mélangeront dans une harmonie qui traduira la magie d'un pays qui existe depuis des millénaires, dans ses différences. Les fouilles menées dans le sud de Aïn Boucherit, sous les auspices du professeur Sahnoun, et publiées dans la prestigieuse revue américaine The science démontrent de façon incontestable, que l'Algérie avait abrité la première civilisation humaine.
Au même titre que l'Ethiopie, elle figure parmi les premiers berceaux de l'humanité depuis 2,6 millions d'années
L'Algérie, c'est un territoire qui s'ouvre comme un livre d'histoire.
L'Algérie, c'est tout ça, et bien plus encore. L'Algérie, c'est bien plus que l'Algérie géographique. C'est l'Algérie résistante.

De Quoi j'me Mêle

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