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Bouira

Au cœur de la station de semence

L’heure de vérité, ce sera, entre mars et avril. Si la pluie continue à ce rythme-là, l’année sera meilleure, pas de doute.

La chose que l'on remarque en mettant le nez dehors est un épais brouillard qui empêche tout rayon de soleil de filtrer. Ce brouillard, qui ne fera que s'épaissir et qui causera notre étonnement, ne se dissipera que dans l'après-midi, laissant place à des nuages qui, eux ne partiront pas. Un phénomène rare, dont, de notre vie, nous n'avons eu l'occasion d'observer une telle épaisseur!
Enchaînant avec notre observation sur le temps, notre chauffeur qui nous conduit ce matin vers la principale station de semence de Bouira, rappelle qu'il est tombé ces trois derniers jours, l'équivalent de 33 mm de pluie. C'est assez pour créer cette trame naturelle composée de milliards et de milliards de gouttelettes d'eau en suspension dans l'air.

Une année un peu spéciale
La chance sourit aux agriculteurs, cette année, après avoir soulevé en eux les plus vives inquiétudes et conduit au ratage de la campagne labours-semailles. La directrice de l'agriculture, qui a toute la confiance et le soutien du wali et de l'APW dans l'épreuve que le secteur a traversé par suite d'une sécheresse jamais connue jusqu'alors, consultée la veille, a déclaré que la superficie emblavée se compose de 75 000 ha. On ne lui a pas demandé de faire mieux, étant donné les circonstances climatiques et météorologiques. Elle fera mieux en 2024, si cette chance persiste: de la pluie, fine et abondante, toutes les semaines. L'heure de vérité, ce sera, entre mars et avril. Si la pluie continue à ce rythme-là, l'année sera meilleure, pas de doute.
Notre souci, ce matin, est aux antipodes. Depuis quelques jours, nous nous intéressons à cette partie de la céréaliculture qui s'occupe de la production et de la multiplication des semences. Une activité vitale, si l'on considère que l'Algérie qui veut éviter les importations et ne pas trop grever son capital de devises, vise à l'autonomie en toute chose.
Et, où pourrions- nous espérer aller prendre les informations que nous cherchions avidement sur ce sujet depuis quelque temps, si ce n'est à cette station dont nous parlions plus haut?
La structure pourrait ne pas payer de mine. Les bureaux sont rustiques. On se croirait à la campagne. On est pourtant en ville, quoi que, à la périphérie, côté nord, pour être précis. Les bureaux sont petits, le système de chauffeur d'un autre temps, mais, à défaut de luxe, la compétence est à tous les niveaux. Les trois ingénieurs au contact desquelles nous sommes mis pour ce travail, font des étincelles et c'est l'essentiel. La chef de service de vulgarisation qui avait reçu un peu plus tôt un coup de fil l'avertissant de notre arrivée et de l'objet de notre visite, nous attend avec des chiffres: 8500 ha pour la production et la multiplication de semence, se répartissant ainsi: 5000 ha de blé dur, 1500 ha de blé tendre, 1600 ha d'orge. L'année qualifiée de spéciale étant placée sous le signe de l'austérité, l'ensemencement à l'hectare a été revu à la baisse. Le protocole a été fixé comme suit: 1,40 q /h pour le blé dur, 1,20 q/h pour le blé tendre et 1q/h pour l'orge.
«Nous savons que nos agriculteurs n'ont pas respecté les recommandations qui leur ont été faites, et nous l'avons signalé dans une note», a averti la cheffe de service Imène Hadj Aïssa. C'est pourquoi, en parlant de la superficie totale réservée à la semence, elle doute que le chiffre de 8 300 ha soit le reflet exact de la réalité. Celui des 154 producteurs multiplicateurs non plus, puisque certains producteurs ne limitant pas leurs pratiques à la seule semence.

Un boulot d'experts
Mais nous voici placés déjà devant des classifications par espèces, variétés et catégories. Par exemple, pour le blé dur qui est une espèce, on a les variétés Simeto, Mansourah et Vitron. Pour le blé tendre, on a AR2, (une variété très demandée, affirme notre interlocutrice) et Maoun. Et puis on a Rihane, une variété d'orge.
La tâche se complique encore lorsque que nous passons avec notre cheffe de service à la vulgarisation aux différentes catégories de blé. À ce stade le classement se fait par génération. De G0 à G4, le produit est dit de semence et de multiplication. On a reçu de la Ccls, le fournisseur attitré en grains des producteurs, la G0, la première en 2024? La G0 deviendra G1 en 2025, et ainsi de suite jusqu'à la G4. Celle-ci donnera, en 2028, le R1 qui générera à son tour le R2 et R3 les deux années suivantes. Ces deux dernières catégories seront dirigées vers la consommation. Mais tout cela n'est encore rien, car cela n'est que de la théorie. Les vraies difficultés se rencontrent sur le terrain. Les producteurs multiplicateurs, comme nous avons appris à les nommer maintenant, sont tenus par un contrat qui fait d'eux des partenaires privilégiés pour la Ccls. Ce contrat leur fait obligation de ne produire que du bon grain, préservé de tout mélange avec les autres. Le champ réservé à sa production fait l'objet pour sa préparation d'un soin méticuleux. Il est de préférence choisi parmi des terres laissées en jachère ou ayant reçu préalablement des cultures maraîchères. Ce champ est également l'objet d'une attention accrue de la part des services de la Ccls par le biais de ses ingénieurs qui suivent le développement du plant, depuis sa mise en terre, jusqu'à son terme. «Si tout se passe bien, si dans le champ ne pousse, à côté, en grande quantité, ni mauvaises herbes ni d'autres variétés de graines, la récolte sera déclarée bonne et sera étiquetée et conservée chez nous, après stockage et usinage. Elle sera classée en catégories jusqu'à l'étape finale qui, en fin de cycle, la destinera à la consommation», explique la cheffe de service à la vulgarisation. Mais, cependant, que se passera-t-il, si le champ contient des impuretés, si, par exemple, on y trouve du Simeto dans du Vitron ou vice versa, ou encore d'autres variétés? Les ingénieurs qui, pendant un mois, n'ont fait qu'adresser des avertissements au propriétaire de la situation sans succès, vont envoyer leurs rapports au Centre national de contrôle et de certification des semences et des fertilisants (Cnccsf) et une seule visite au champ signalé sera décisive, soit pour le déclasser, soit pour le refuser carrément. Une question se pose: que gagne un agriculteur à se faire multiplicateur de semence? Pourquoi accepterait-il toutes ces peines supplémentaires et tous ces risques de voir ses champs déclassés ou refusés? C'est que, nous indique Mme Hadj Aïssa, il y a une prime attachée à cette spécialisation. Elle est attribuée selon les catégories. Elle est de 25% du prix d'achat du produit agricole pour les catégories allant de G0 à G4. De 20% pour le R1 par lequel se clôt le cycle de production et de multiplication de la semence. Et on comprend un peu ceux qui ronchonnent cette année en recevant les G4 et R1. Si ces deux catégories permettent au producteur multiplicateur d'être éligible à cette prime, cette dernière est de 5% moindre pour le R1 que pour les quatre autres.
La production est reçue au niveau des deux stations que possède la Ccls. L'arrivage s'effectue sous forme de sacs, de Big Bag, (des sacs de 11 à 12 quintaux) ou encore en vrac. Un agréeur ou contrôleur pratique sur le sac ou le tas réceptionné, une ponction à l'aide d'une sonde. L'échantillon ainsi prélevé et analysé permet de déterminer la qualité du produit.

Stockage et usinage en règle
La production en sacs réceptionnée est ensuite acheminée vers des hangars, dont il existe deux à Bouira, et deux autres à Aïn Bessem et Sour El Ghozlane. Pour la production en vrac, il y a les silos en béton. L'opération de vérification n'a d'autre but que de certifier la qualité du produit livré, il ne se mêle «aucun mélange spécifique», fait remarquer Mme Hadj Aïssa. Mais c'est à l'Institut technique des grandes cultures que se fait le classement de la production et de la multiplication de la semence G0,G1, G2 et G3. Les plus difficiles à classer. Le soin de classer le G4 qui débouche inévitablement sur le R1 et ce dernier par quoi se ferme le cycle, est confié en fin de compte à la Ccls qui, à cet égard travaille en collaboration avec le Cncc.
Il y a deux stations de semence à travers la wilaya. Il y a celle de Bouira, où nous sommes aujourd'hui, d'une capacité estimée à 45 000 q, puis celle d'Aïn Bessem avec 24 000. Enfin, il y a les hangars évoqués brièvement plus haut. Ceux au nombre de deux à la station de Bouira. C'est dans l'un d'eux qu'est réceptionnée chaque année la production de semence, le second, comme celui de Aïn Bessem de 15 000 q étant pour les engrais.
Nous avons changé de bureau et de service. Nous ne sommes plus dans le bureau de Mme Hadj Aïssa, mais dans celui, juste à côté, avec une cloison mitoyenne en parpaing. Deux ingénieures nous font face: Mme Ouahiba Sid Athmane, cheffe de service d'usinage, et pour la seconder dans sa tâche, l'ingénieure Imène Bouamria. Ici intervient ce qu'on appelle l'opération d'usinage. Trois appareils entrent en action. Un de fabrication turc, comportant plusieurs tapis et où le travail se fait à l'horizontale avec des techniques élaborées, explique la cheffe de service d'usinage. Et puis, il y a les deux autres, plus anciens, à plusieurs étages, équipés de tamis, et, où les grains, quand ils arrivent en bas, après de telles épreuves sont déclarés bons, c'est-à-dire nets de tout autre mélange. La production stockée subit enfin un traitement, un fongicide, contre les champignons, et un certificat d'acceptation est délivrée par la Ccls et le Cncc, appelée CAD. Lorsque ce travail est terminé, midi n'est pas loin alors que le temps, lui, couvert du même brouillard ne semble pas avoir bougé.

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