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HOMMAGE À MOHAMED MAZOUNI

A la rencontre de Nadia Guendouz

Il n'est pas exagéré de souligner ici que le monde des arts lyriques doit la découverte de la talentueuse Behidja Rahal à Mohamed Mazouni. Ce fut un triomphe pour le musicien et pédagogue et la voie tracée pour l'heureuse élue qui, avec la bénédiction de cheikh Abderrezak Fakhardji, connaîtra les feux de la rampe grâce à El Fakhardjia, l'ensemble As Soundoussia alors dirigé par Nour Eddine Saoudi et à une carrière artistique professionnelle riche et prometteuse.

Une carrière que bonifie, présentement, un statut de formatrice au sein du Centre culturel algérien de Paris, un vibrant hommage à ceux qui l'ont formée, guidée et adulée, avec à leur tête Mohammed Kheznadji, Abderrezak Fakhardji et Nour Eddine Saoudi. Cette évocation serait incomplète si elle n'était pas étendue à l'opportunisme musical de Smaïl Hini au moment où il était secrétaire général d'As Soundoussia. S'il vous arrivait d'être à Paris, n'hésitez pas à rendre une visite de courtoisie à Behidja sur son lieu de travail. Vous me diriez alors que ce n'est là qu'un juste retour des choses pour celle qui eut l'insigne honneur d'aller en Nouvelle-Calédonie à la rencontre de Cheikh El Hasnaoui faisant fi d'une réalité tangible où la mémoire ankylosée semblait être maîtresse de céans...Et vous auriez amplement raison, mais laissez-moi au moins guider vos pas à un moment où j'entends quelques éclats de voix rauque dont Mohamed Mazouni avait seul le secret. De là où il se trouve, il sent où votre obligé veut en venir ayant été à l'origine de l'une de ses plus belles résurrections...Puis, une chanson, celle qu'il enregistra bien avant de connaître son incarnation palpable, l'être humain qui allait le marquer indélébilement. En vous proposant d'emprunter la rue Nadia Guendouz pour rejoindre le Centre culturel algérien de l'Hexagone, c'est juste pour corroborer la dimension humaine de mon énoncé. Et pour porter à votre connaissance surtout le magnifique geste d'une élue communiste, Jacqueline Rouillon, qui n'a pas hésité un seul instant à donner le nom de la poétesse à une des rues de Saint-Ouen. Malgré une pétition maintes fois renouvelée pour exiger que la plaque en hommage à la militante du FLN Nadia Guendouz soit retirée et que la rue soit rebaptisée. Pour l'anecdote, la rue en question est perpendiculaire à celle portant le nom de Louis Dreyfus, tout près de la rue Yitzhak Rabin... Donc c'est loin d'être sans-arrière pensées, que Mohamed Mazouni me voyait venir.
Il fallait que je réveille nos vieux souvenirs partagés tout au long des déplacements d'El Fakhardjia à travers quelques grandes médinas de notre merveilleux pays. Ceux de Mostaganem, d'Oran, de Constantine et de Koléa avec Abderrahmane El Djillali, Mahieddine Bachetarzi, Abderrezak Fakhardji, El Boudali Safir et Ahmed Sefta sont non des moindres.

La dimension humaine de Nadia Guendouz
Notre complicité à tous les deux fut grande à l'époque quand il fallait gérer une grande amie que j'avais introduite au sein de notre association. Une ancienne militante de la cause nationale, une poétesse dont la sensibilité à fleur de peau ne manquait pas de déranger les incultes aux visions réductrices. Nadia Guendouz, puisque c'est de toi qu'il s'agit, permets à Mohamed et à ton préféré - l'homme à la belle moustache - de ressusciter des tranches de vie inoubliables. Permets-moi de clamer à la face de ce monde injuste et de ses supputations castratrices ton amour du prochain, ta conception altruiste du bonheur et ta dimension humaine que tu as su inculquer à cet homme bourru qui est parmi nous ce soir, avec un immense coeur. Ce même coeur qui t'aura happée et réconciliée avec toi-même à un moment où tu n'en menais pas large, où tu fuyais la solitude, pour mieux porter notre combat pour l'instauration de la démocratie et la justice sociale.
A un moment où nous donnions des leçons de citoyenneté en réussissant le tour de force de réunir au siège de notre association Bachir Hadj Ali, un enfant de la Casbah comme toi et moi Nadia, et Mouloud Kassim Naït Belkacem, le docte ministre des Affaires religieuses, autour d'une conférence sur la musique citadine donnée par l'un des plus prestigieux animateurs du Parti communiste algérien. Tu as été toi-même emballée par mon article dans la presse dont le titre «Faut-il brûler l'Alhambra?» n'a pas manqué de faire réagir et de susciter moult interrogations. J'étais ta fierté, je sais et tu l'es toujours à mes yeux surtout que tu continues à déranger ton monde, en particulier notre ami Mohamed Mazouni qui, réprimant difficilement ses tremblements sur la scène du Palais de la culture, vient de faire une somptueuse découverte: la muse à l'origine de la création de la fameuse chanson «Ya moulette essar ouel b'ha», c'était donc bien toi...Nadia...Reposez en paix tous les deux. Mohamed ne m'en veut surtout pas d'avoir été loin. Le plus important est que ton fils Bachir demeure le gardien du temple à travers cette attachante association qu'est El Djazira même si notre ami Abdelwahab Nefil d'El Fakhardjia continue à sombrer dans un conservatisme inhibiteur et à nourrir surtout l'espoir vain d'une fusion qui donnerait naissance à Djaziret el Fakhardjia...
Des prouesses poétiques respirant les envolées romantiques
Je ne terminerai pas cet hommage Nadia sans t'annoncer une bonne nouvelle: le retour de l'enfant terrible de la citadinité que j'ai toujours été et de sa légendaire moustache mise en cage des décennies durant.
Malgré les coups reçus et le rétrécissement du champ d'expression médiatique. Cela me rend plus fort encore bien que notablement fragilisé par la perte de ma mère, une militante comme toi, une femme de chahid qui n'avait en tête que le bonheur de ses enfants... au détriment de son bonheur propre... Dans un pays où la reconnaissance du ventre y compris celle des autres femmes est loin d'être une valeur sacro-sainte, où le futile inhibe son monde.
Nadia, ou si vous préférez Aouaouèche Guendouz, l'avait vécu dans sa chair, à son corps défendant...Elle qui suscitait sempiternellement l'attention de mon ami et confrère Merzak Bagtache, voire sa curiosité surtout lorsqu'elle parvenait à restituer des prouesses poétiques respirant les envolées romantiques tout en étant, en tant que sage-femme, à l'écoute de ses soeurs mal dans leur chair, dans leur vécu et leur rapport à la violence conjugale.

Une grande leçon d'humanité
Mohamed Mazouni a su comprendre à temps son désarroi, comme je le fis en l'impliquant dans les activités d'El Fakhardjia et en l'emmenant partout avec moi dans nos déplacements.
Il répondait toujours présent et assumait pleinement ses responsabilités à un moment où une amie, et non des moindres, avait tant besoin d'un minimum d'humanisme. Merci Bachir de me l'avoir confirmé.
Hadj Mohamed Mazouni décéda le 21 janvier 1990. Nadia, deux années plus tard, soit le 4 avril 1992. Merci à tous les deux pour cette leçon d'humanité qui irriguera certainement tous les sens de nos musiciennes et musiciens appelés désormais à interpréter les quelques fragments de nos Andalousies perdues avec émotion, le coeur à l'ouvrage.

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