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Edgar Morin et la barbarie du calcul, du fric et de l'intérêt (2e partie et fin)

«L'Occident chrétien a persécuté les juifs depuis son origine et Israël est devenu son champion. L'Islam a protégé les juifs depuis son origine et Israël est devenu son ennemi.» Edgar MORIN

Pour comprendre la philosophie d'Edgar Morin, il y a lieu de lire utilement L'Aventure de «La Méthode», son dernier livre paru. Pour une plongée la plus simple dans son oeuvre immense, soutient la critique littéraire. Une critique particulièrement émerveillée par son tour de force de fondre en une seule vie des décennies de recherches fondamentales, d'engagements civiques éclatants et de pensées morales ou spirituelles. C'est un hymne à la vie qui nous permet de découvrir un être humain dans toute sa splendeur, puissant et touchant à la fois, bien placé pour témoigner que «nous approchons de l'extase également par l'invasion en nous du Mystère». Pour de nombreux spécialistes des questions littéraires et philosophiques, ces déclarations purement mystiques ne signifient pas pour autant une rupture avec sa philosophie de l'action et de la responsabilité vis-à-vis du monde. Un combat auquel, fait-on remarquer, il ne s'est jamais dérobé: «S'émerveiller des splendeurs de la vie et y trouver l'énergie pour se révolter contre les horreurs», telle est sans doute in fine sa devise. Une attitude qui n'est pas sans courroucer, non seulement les sionistes qui l'abhorrent, mais aussi et surtout cette barbarie dont le socle est la spéculation: «Non seulement l'économie mondiale n'est pas régulée, mais elle est sous la domination d'une oligarchie financière qui, elle-même, fait de la spéculation, pour le profit. C'est-à-dire qu'au moment où il y a une récolte importante, on garde les graines et on attend qu'elles deviennent rares, pour les vendre plus cher. Il y a de la spéculation.» Certainement révolté par la soldatesque sioniste et l'impunité dont elle jouit, aidée en cela par la barbarie de l'Occident, Edgar Morin provoquera l'ire du sionisme mondial, en cosignant, avec Sami Naïr et Danièle Sallenave, Israël-Palestine: Le cancer. Un pamphlet d'une rare violence où, est-il précisé, que le cancer israélo-palestinien s'est formé à partir d'une pathologie territoriale, la formation de deux nations dans une même contrée, source de deux pathologies politiques, l'une née de la domination, l'autre de la privation: «Il s'est développé d'une part en se nourrissant de l'angoisse historique d'un peuple persécuté dans le passé et de son insécurité géographique, d'autre part du malheur d'un peuple persécuté dans son présent et privé de droit politique.» Pour les co-auteurs de cet article, Israël se présente comme le porte-parole des juifs victimes d'une persécution multiséculaire jusqu'à la tentative d'extermination nazie: «Sa naissance attaquée par ses voisins arabes a failli être sa mort. Depuis sa naissance, Israël est devenu une formidable puissance régionale, bénéficiant de l'appui des Etats-Unis, dotée de l'arme nucléaire.» Et pourtant, fait remarquer la même source, Sharon a prétendu lutter pour la survie d'Israël en opprimant et asphyxiant la population palestinienne, en détruisant des écoles, archives, cadastres, éventrant des maisons, brisant des canalisations et procédant à Jenine à un carnage dont il interdit de connaître l'ampleur: «L'argument de la survie n'a pu jouer qu'en ressuscitant chez les Israéliens les angoisses de 1948, le spectre d'Auschwitz, en donnant à un passé aboli une présence hallucinatoire. Ainsi, la nouvelle Intifada a réveillé une angoisse qui a amené au pouvoir le ré-conquistador Sharon qui va compromettre les chances de survie d'Israël. En d'autres termes, il ignore totalement que le triomphe d'aujourd'hui prépare le suicide de demain: «C'est la conscience d'avoir été victime qui permet à Israël de devenir oppresseur du peuple palestinien. Le mot «Shoah «qui singularise le destin victimaire juif et banalise tous les autres (ceux du goulag, des Tsiganes, des Noirs esclavagisés, des Indiens d'Amériques) devient la légitimation d'un colonialisme, d'un apartheid et d'une ghettoïsation pour les Palestiniens.» L'on comprend mieux les raisons qui ont fait qu'Edgar Morin ait été qualifié de «traître juif», et accusé de manquer d'«amour» pour son peuple, d'avoir la «haine de soi». Ce concept, forgé à la fin des années 1920, nous apprend Esther Benbassa, auteure du livre Les juifs hier, les musulmans aujourd'hui, Mille et une nuits, renvoie initialement au comportement de ces juifs d'Europe centrale qui finirent par intérioriser, parfois jusqu'au suicide, le rejet auquel ils étaient confrontés de la part d'une société dont ils se sentaient partie intégrante: «Rien à voir là ni avec Morin ni avec d'autres juifs critiques disqualifiés ainsi à bon compte seulement parce qu'ils ne suivent pas la ligne dure de la communauté juive sur le conflit proche-oriental.» Le nouvel «antisémite» n'est plus celui qui hait le juif, mais le juif démocrate incapable de fermer les yeux sur le sort quotidien des Palestiniens placés sous occupation israélienne.

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