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IMMIGRATION, XÉNOPHOBIE ET PRÉSIDENTIELLE

Les sujets qui divisent en France

Le président Sarkozy propose de réformer la Constitution pour une révision profonde de la politique migratoire.

Le mot tombe comme un couperet! «Sarkozy propose un référendum sur l'immigration», annonce M.Cordier, un retraité coiffé d'un béret. Sourire au coin des lèvres, il tient le dernier numéro du Figaro Magazine, paru en cette matinée glaciale de samedi. «Ça caille!» Cette formule consacrée en patois indique le froid de canard qu'il fait à la ville d'Amiens, dans la région de Picardie, au nord de la France.
M.Cordier prend un verre en compagnie de son ami Gérard, dans un bistrot sis route de Paris. Devant le comptoir, ils engagent une discussion sur les derniers rebondissements de la campagne pour la présidentielle qui approche à grands pas. Une lueur de malice se décline dans les yeux de M.Cordier. «Que penses-tu, Gérard, de cette réforme de la Constitution que propose Sarkozy, hein?» dit-il pour taquiner Arezki, un jeune Kabyle originaire d'Azeffoun établi à Amiens depuis quelques années, qui se trouvait juste derrière eux. Ce dernier sourit. Les trois hommes se connaissent. Gérard, la barbe grisonnante de trois jours, sollicite le Figaro Magazine de son ami qui se fait un malin plaisir à lui montrer l'«entretien exclusif» accordé par le Président Sarkozy au magazine. Son portrait s'affiche à la Une.
Il est souriant et semble à l'aise dans son costume de président. Le titre de l'interview-fleuve en dit long sur sa teneur: «Mes valeurs pour la France». L'exergue est axé sur le travail, l'éducation, la famille, la laïcité, autant de sujets dont le candidat socialiste et favori des sondages, François Hollande, a fait les thèmes phares de sa campagne. «Le président s'engage!», lit Gérard à la fin de l'exergue. «Cela veut dire qu'il se porte candidat...», conclut-il. «Non! Il ne s'est pas encore prononcé», lui rétorque son ami en riant. «Oui, c'est ça...et moi, je n'ai pas encore porté mon toast! Allez à la tienne!» dit Gérard. Les deux amis boivent, puis relancent le débat...
L'immigration, un sujet qui fâche «Lis ce que propose Sarkozy sur cette question», propose M.Cordier à son ami en lui montrant les pages 27-28 du magazine. Les journalistes interrogent: «François Hollande propose d'accorder le droit de vote aux immigrés aux élections locales, Vous-mêmes (Sarkozy) l'aviez envisagé par le passé...»
Autres temps, autres moeurs, semble dire le président-presque candidat. «Ma réponse est non», a tranché Sarkozy. «Bien dit!» se félicite M Cordier. La réponse de Sarkozy ne s'arrête pas là. «Contrairement à M.Hollande, je ne suis pas favorable à la régularisation des étrangers en situation irrégulière qui créerait immédiatement un appel d'air...». Et Gérard de commenter: «Il est en train de braconner sur les terres de l'extrême droite.» Cela ne plaît pas à Arezki. «Et le gibier n'est autre que l'immigration...», réagit-il.
M.Cordier sourit. «Ce n'est pas tout!», dit-il à Arezki. Il lit la suite de la réponse de Sarkozy sur le droit des étrangers. «Il veut réformer la Constitution, il veut attribuer la compétence de gérer ce dossier à la seule juridiction administrative en le retirant aux tribunaux judiciaires», explique M.Cordier.
La politique migratoire a été des plus drastiques, ces dernières années. Selon le président Sarkozy, pas moins de 33.000 immigrés en situation irrégulière ont été expulsés de France, l'année dernière. «Le niveau de l'immigration régulière a baissé de 3,5% de 2010 à 2011 pour s'établir à 182.000», a-t-il indiqué dans le même entretien.
Il a, également, insisté sur la réduction du regroupement familial «désormais accordé sous condition de logement et de ressources» qui est passé de 25.000 par année à 15.000. Fort de ce constat, le président Sarkozy propose que les titres de séjour obtenus par le mariage avec une Française (plus de 25.000 par an, actuellement) «soient soumis aux même conditions de logement et de ressources». Après avoir lu ces réponses, M.Cordier se moque: «Il (Sarkozy) vous promet des canadairs pour vous renvoyer chez vous...», lance-t-il à Arezki.
La réaction de ce dernier ne s'est pas fait attendre. «M.Cordier, vous mettez tout le monde dans le même sac.
Nous travaillons et gagnons notre argent à la sueur de notre front, nous accomplissons les travaux les plus difficiles que les Français rechignent à faire... mais des personnes comme vous, pas tous les Français, ne nous portez pas dans vos coeurs. Pourquoi?» demande-t-il à M.Cordier. «Allez à Amiens nord (le Col Vert) et vous aurez la réponse», rétorque M.Cordier. Ce quartier, réputé «chaud», est occupé par une forte communauté maghrébine.
Hollande-Sarkozy et la main de Judas Dans le bistrot, l'affluence est plus nombreuse. On vient acheter le journal, prendre un verre, chercher un jeu à gratter, voir les résultats du tiercé sur l'écran plat accroché au mur, au fond de la salle... Cela ne semble pas déranger les trois amis.
«Hé! dites, vous avez vu François Hollande et Sarkozy à la télé? Il les ont montrés en train de se serrer la main, Ils ont posé pour les photos ensemble», s'étonne Gérard auprès de ses deux interlocuteurs. «Cela t'étonne? Ils mangent et boivent ensemble et nous font croire qu'ils sont en désaccord sur tout... Mon seul président, c'est mon porte-monnaie», tranche M.Cordier. Invités mercredi dernier au dîner annuel du Conseil représentatif des institutions juives en France (Crif), M.Hollande et M.Sarkozy ont volé la vedette aux présents, à l'instar de l'ancien Premier ministre sous Chirac, Dominique De Villepin. Mieux, M.Hollande a réussi un véritable coup médiatique en se levant de sa table pour aller saluer le président Sarkozy. «Tu devrais faire la photo avec moi», lui a-t-il dit, comme rapporté par plusieurs titres de presse.
Cet événement est intervenu, alors que la polémique des propos tenus par Claude Guéant, ministre de l'Intérieur, sur «la hiérarchie des civilisations» battait son plein. Qualifiés de «bon sens» par le président Sarkozy, ces propos ont provoqué un clash au Parlement.
En effet, le député de la Martinique Serge Letchimy, a évoqué «le régime nazi» en répliquant aux déclarations de M.Guéant Immédiatement, le Premier ministre, François Fillon et les membres de son gouvernement ont quitté l'hémicycle. «Tout cela ne veut rien dire. Ils sont tous à la chasse!» estime M.Cordier qui boit son verre et se lève pour partir. Dehors, les rayons matinaux du soleil de ce week-end ne peuvent enrayer le froid. Les artères et ruelles de la ville d'Amiens grelottent.

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